À la radio, les informations de la mi-journée revenaient sur la question du remboursement des subventions par les agriculteurs. Un représentant syndical de ces derniers expliquait que sans les aides reçues de l'état français dans la période 1992 - 2002, nombre d'exploitations risquaient de disparaître, à l'époque.
Chez nous, les agriculteurs constituent un petit univers en soi, auquel s'applique des sentiments contradictoires, pour des raisons que la raison ne connaît pas. À gauche, nous ne portons pas vraiment les paysans dans notre cœur: ils sont le terreau de la droite. Et pourtant, qui d'entre nous n'a pas des origines rurales, quelques proches parents, ou des cousins éloignés, plus ou moins vissés au cul de la vache? On soupire régulièrement d'apprendre les attentions financières dont ils font l'objet, grâce à nos impôts, on les considère volontiers comme de perpétuels assistés…
Ce faisant, nous oublions que ces assistés-là travaillent durement, et surtout que nous sommes nourris par eux. Certains penseront que ce n'est plus vrai, qu'une bonne partie de ce qui atterrit dans nos assiettes vient d'ailleurs… Soit, mais je me demande si nous serions nombreux, ayant appris que «labourage et pâturage sont les deux mamelles de la France», à nous résigner de gaieté de cœur à ne plus dépendre, demain, que de l'agriculture de nos voisins? Je me demande combien d'entre nous se satisferaient de voir nos hameaux, nos villages, désertés, les campagnes retourner à l'état de friches pas forcément pittoresques.
À l'époque concernée, c'était bien le moins que l'on pouvait attendre du gouvernement, dans un pays traditionnellement agricole, qu'il se porte au secours de ses paysans en difficulté. Arguer, comme l'ont fait les instances européennes, que les règles de la concurrence auraient été faussées de ce fait, c'est démontrer une fois de plus que l'Europe ne se soucie pas des êtres humains qui la composent, mais exclusivement du commerce. Seuls sont pris en compte les desiderata du monde des affaires, c'est à dire de tout ce qui est animé par les motivations les plus viles d'une société: l'enrichissement, la loi du plus fort. Une loi qui s'applique régulièrement à l'encontre du monde paysan, ainsi que le démontrent ses conflits avec les intermédiaires sur le prix des denrées .
Aussi traditionnellement qu'ils perpétuent une activité où la France fut un temps auto-suffisante, les paysans ont la colère explosive. Il est souvent impossible d'être en accord avec leur atavisme réactionnaire, l'indulgence dont le pouvoir fait régulièrement preuve à l'égard de leurs actions brutales, est tout aussi souvent révoltante —du moins par comparaison avec la rigueur appliquée aux écarts des simples salariés.
Pourtant, il arrive que l'on comprenne les bouffées de révolte de nos paysans, voire que l'on ait envie de les partager, ce qui fut récemment le cas lorsqu'ils s'en prirent à la grande distribution. Cette affaire des subventions à rembourser à l'état, pour satisfaire à la loi de la jungle des mercantis Bruxellois, en est un autre exemple. Dix sept ans après, pas un sou ne devrait sortir de leurs poches, ni des nôtres. Il ne faut pas hésiter à les soutenir.
P-S. L'affaire est évidemment plus complexe que ce billet ne le montre. Je recommande donc aux lecteurs de lire à ce sujet l'analyse de «Section socialiste de l'île de Ré»
Et pour finir sur un sourire, je vous conseille la lecture de «Ma rengaine», chez αяf…
Chez nous, les agriculteurs constituent un petit univers en soi, auquel s'applique des sentiments contradictoires, pour des raisons que la raison ne connaît pas. À gauche, nous ne portons pas vraiment les paysans dans notre cœur: ils sont le terreau de la droite. Et pourtant, qui d'entre nous n'a pas des origines rurales, quelques proches parents, ou des cousins éloignés, plus ou moins vissés au cul de la vache? On soupire régulièrement d'apprendre les attentions financières dont ils font l'objet, grâce à nos impôts, on les considère volontiers comme de perpétuels assistés…
Ce faisant, nous oublions que ces assistés-là travaillent durement, et surtout que nous sommes nourris par eux. Certains penseront que ce n'est plus vrai, qu'une bonne partie de ce qui atterrit dans nos assiettes vient d'ailleurs… Soit, mais je me demande si nous serions nombreux, ayant appris que «labourage et pâturage sont les deux mamelles de la France», à nous résigner de gaieté de cœur à ne plus dépendre, demain, que de l'agriculture de nos voisins? Je me demande combien d'entre nous se satisferaient de voir nos hameaux, nos villages, désertés, les campagnes retourner à l'état de friches pas forcément pittoresques.
À l'époque concernée, c'était bien le moins que l'on pouvait attendre du gouvernement, dans un pays traditionnellement agricole, qu'il se porte au secours de ses paysans en difficulté. Arguer, comme l'ont fait les instances européennes, que les règles de la concurrence auraient été faussées de ce fait, c'est démontrer une fois de plus que l'Europe ne se soucie pas des êtres humains qui la composent, mais exclusivement du commerce. Seuls sont pris en compte les desiderata du monde des affaires, c'est à dire de tout ce qui est animé par les motivations les plus viles d'une société: l'enrichissement, la loi du plus fort. Une loi qui s'applique régulièrement à l'encontre du monde paysan, ainsi que le démontrent ses conflits avec les intermédiaires sur le prix des denrées .
Aussi traditionnellement qu'ils perpétuent une activité où la France fut un temps auto-suffisante, les paysans ont la colère explosive. Il est souvent impossible d'être en accord avec leur atavisme réactionnaire, l'indulgence dont le pouvoir fait régulièrement preuve à l'égard de leurs actions brutales, est tout aussi souvent révoltante —du moins par comparaison avec la rigueur appliquée aux écarts des simples salariés.
Pourtant, il arrive que l'on comprenne les bouffées de révolte de nos paysans, voire que l'on ait envie de les partager, ce qui fut récemment le cas lorsqu'ils s'en prirent à la grande distribution. Cette affaire des subventions à rembourser à l'état, pour satisfaire à la loi de la jungle des mercantis Bruxellois, en est un autre exemple. Dix sept ans après, pas un sou ne devrait sortir de leurs poches, ni des nôtres. Il ne faut pas hésiter à les soutenir.
P-S. L'affaire est évidemment plus complexe que ce billet ne le montre. Je recommande donc aux lecteurs de lire à ce sujet l'analyse de «Section socialiste de l'île de Ré»
Et pour finir sur un sourire, je vous conseille la lecture de «Ma rengaine», chez αяf…
Quand en France, il y a prescription au bout de dix ans, ne peut-on pas faire de même en Europe. C'est quoi cette Europe qui réclame une décennie après avoir autorisé le versement de subventions?
RépondreSupprimerHomer,
RépondreSupprimereh non! La prescription ça n'existe pas avec les règlements européens… Et s'il faut en croire les infos de "Section socialiste", l'affaire de l'amende traîne aussi depuis un bout de temps.
Le problème initial vient du clientélisme du gouvernement. Il savait qu'il y aurait un problème mais il a laissé courir.
RépondreSupprimerSur les paysans, ils préfèreraient mille fois ne pas être subventionnés et vivre correctement de leur travail qui reste difficile. D'autant que les subventions profitent surtout aux gros producteurs
Vincent,
RépondreSupprimerle clientélisme est en effet le fond du problème, et j'associerais la FNSEA au gouvernement, là-dessus.
Je crois que tu as raison en disant que les paysans préfèreraient vivre de leur travail sans subventions.
Salut
RépondreSupprimerpuisque tu m'as mis en lien, tu as dû lire mon billet inspiré de Ziegler.
Le système agricole de nos pays est en train de détruire les pays du tiers monde. Certains me diront :"on s'en fout des nègres et des rastaquouères, ils sont loins et s'ils en sont là où ils sont c'est qu'ils sont plus faibles que nous." Je connais ce discours (assez courant chez les néo-libéraux). Bien sûr c'est pas dit comme ça, en général il y a plein de mots compliqués et des histogrammes pour décorer le discours de ces spécialistes des chiffres et des bénéfices.
J'ai du mal à m'apitoyer sur nos pauvres agriculteurs, j'ai même du mal à m'apitoyer sur le plus pauvre des européens : C'est encore un privilégié.
Un enfant meurt de faim toutes les 5 secondes dans le monde, alors leur 500 millions, qu'ils se les foutent au cul, tout ça est indécent dans notre société menacée par l'obésité.
D'un côté, l'UE prétend au libéralisme pur en interdisant toute subvention mais de l'autre, elle use de quotas pour réguler le marché mondial, faudrait réféléchir !
RépondreSupprimerL'agriculture ne devrait simplement pas être mondialisée, les pommes du Chili pour les chiliens !
:-)))
[L'agriculture, ça eut payé ! ;-)) ].
Rimbus,
RépondreSupprimerautant que possible, je mets toujours en lien quelque billet dont l'avis diverge du mien, tout en restant de gauche…
La mondialisation détruit l'agriculture du tiers monde, certainement. Maintenant, si tu crois pouvoir te passer d'agriculteurs, tu te goures…
D'autre part, au nom d'un enfant qui meurt de faim toutes les 5 seconde dans un monde qui va crever de surpopulation, faut-il ne plus rien dire sur rien dans la société où nous vivons? Bien sûr que non!
M Poireau
oui la mondialisation est absurde, et dramatiquement chère à tous égards. Transporter les pommes du Chili ou d'Argentine est absurde, en énergie, en CO2… La sagesse serait de nous en tenir aux produits saisonniers en n'important que les denrées que nos sols ne peuvent produire.
@le coucou : tu as raison, il ne s'agit pas de se passer des agriculteurs... Mais quand même, la différence entre le niveau de vie des pays du nord comparée à celui des pays du sud est un scandale. Et ça c'est une question qui concerne la politique en général. Affamer le tiers monde pour que des connards beaucerons puissent rouler en 4x4 n'est pas défendable. Tous les agriculteurs français ne sont pas pauvres.
RépondreSupprimerRimbus,
RépondreSupprimeren effet, nous sommes totalement d'accord sur le sort réservé aux pays du sud.
Quant à nos paysans, il ne serait pas question de s'attendrir sur les céréaliers qui ont profité au maximum de l'Europe —et n'oublions pas les têtes couronnées, les industriels de l'agroalimentaire, qui sont généreusement arrosés également…
Mais dans cette affaire, il s'agissait d'aides de l'état français à des filières en difficulté.