Les parisiens ont la chance de pouvoir emmener leurs enfants au 26e Salon du livre et de la presse jeunesse à Montreuil. Cette année, le salon est placé sous le signe du conte de fée. Comme je n'irai pas, je propose néanmoins au lecteur un petit texte de cette nature…
Il était une fois deux princesses charmantes qui vivaient dans un pays lointain dont le roi était abominable. C'était un roi si mauvais qu'il était impossible de prononcer son nom, *******, sans se couvrir aussitôt de boutons et sans cracher des scorpions et des araignées grasses qui laissaient pendre ensuite des fils visqueux aux coins de votre bouche. C'est pourquoi personne n'avait seulement pensé dire un jour : Sa Majesté *******. Les sujets du royaume avaient assez de misères à supporter comme ça, ils préféraient se taire.
Donc, il se trouvait quelque part dans ce pays, loin du palais royal où elles n'étaient jamais invitées, deux princesses charmantes. La première se nommait Solène, elle aimait rêver toute éveillée à des choses aimables du matin au soir. La seconde avait nom Matine et rien ne lui plaisait autant que de dormir dans son boudoir. Son sommeil était ravissant : tous ceux qui venaient à passer sous sa fenêtre en étaient enchantés et se mettaient à bâiller des violettes embaumées. Comme ils attrapaient aussi les songes merveilleux de Solène, ils rentraient vite se coucher chez eux afin de prendre une heure de bonheur. Tout le monde aimait à prononcer les noms des princesses, car ils vous mettaient à la bouche une saveur de chocolat truffé et de vanille naturelle, sans conservateur.
Cela permettait d'oublier les tourments infligés par le roi *******. Celui-ci en inventait chaque jour de nouveaux, car c'était un homme très actif. «Prenez tous les vieux du royaume et qu'on les attelle aux charrues pour labourer, ça économisera l'essence», disait-il par exemple à son Grand Chancelier. Ou bien il ordonnait au Moyen Chancelier : «Que toutes les horloges avancent désormais d'une heure le matin et retardent d'une autre le soir, afin que mes sujets fainéants travaillent plus !» Il n'y avait pas de Petit Chancelier, mais un simple Chancelier du Tabouret, parce que le roi avait fait découper le mot petit aux ciseaux dans tous les dictionnaires. Il était interdit de le prononcer sous peine de finir accroché au mur du palais par son trou le moins grand.
Les deux princesses voyaient bien que le peuple était très malheureux : Solène entendait ses plaintes quand elle sortait rêver sur le balcon, Matine ne pouvait les ignorer au moment de prendre son petit déjeuner ou sa collation de la mi-journée. «Mon Dieu, comme ces gens souffrent ! Je vais dormir, parce que je ne sais pas quoi faire pour les aider», disait-elle.
Or, il advint une nuit que les rêves de Solène s'installèrent dans le sommeil de Matine, comme cela peut aisément arriver lorsque deux princesses sommeillent dans des chambres voisines. Matine s'éveilla en sursaut à potron-minet (ainsi appelait-on dans le royaume ce moment où le jour n'est pas encore grand), et courut trouver Solène. Lorsqu'elle ne dormait pas, c'était en effet une princesse énergique, ce que nous découvrons avec elle, car elle courait pour la première fois. «J'ai trouvé comment sauver le peuple : il faut couper la tête au roi, et puis faire des édits pour concrétiser toutes ces belles choses dont tu rêves !»
Couper la tête du roi, elles auraient bien voulu le faire, mais il y avait loin de l'intention au tranchant de l'épée… Comment affronter le roi lorsqu'on n'est que belles princesses fragiles et sans épée ? Elles sortirent du château et appelèrent le peuple à la rescousse : «Venez avec nous, et allons décapiter le roi !» cria Solène.
Le peuple les regarda d'un air hésitant, les têtes se baissaient et les pointes de souliers grattaient le sol avec gêne. Un homme moins timide finit par répondre: «Mon œil, jolies princesses ! Où sont vos muscles, où sont vos épées tranchantes ? On va se faire étriper par les chevaliers de *******, c'est tout !» Il ne prononça pas le nom, bien sûr, mais il cracha par terre et se gratta vigoureusement, parfaitement compris de tous.
Les choses en étaient là, et les princesses se disposaient à rentrer tristement au château, lorsque la nouvelle se répandit que le prince charmant Mimidoux venait de débarquer au port du Couchant. Le prince Mimidoux était un voisin de Solène et Matine, ils avaient souvent joué ensemble aux princesses et au docteur dans leur enfance. À l'âge adulte, le prince avait été envoyé par le roi combattre le dragon Krizz en pays sauvage, une façon de se débarrasser de lui. Depuis lors, on était sans nouvelles de Mimidoux.
Les princesses et le peuple se précipitèrent alors à sa rencontre… Après les bisous d'usage, le goûter de quatre heures, et quelques menues dispositions exigées par la situation, Mimidoux marcha sur le palais royal à la tête du peuple. Il bouscula les deux ou trois chevaliers qui n'avaient pas pris la fuite, puis du tranchant de son épée, il décolla le roi *******. Dans le pays entier ce ne fut qu'un cri d'allégresse : vive le roi Mimidoux !
Alors Mimidoux prit de sa main gauche celle de la princesse Solène, de sa main droite celle de la princesse Matine, et il les mena dans la chambre royale. Il les baisa et leur fit des tas d'enfants.
Il était une fois deux princesses charmantes qui vivaient dans un pays lointain dont le roi était abominable. C'était un roi si mauvais qu'il était impossible de prononcer son nom, *******, sans se couvrir aussitôt de boutons et sans cracher des scorpions et des araignées grasses qui laissaient pendre ensuite des fils visqueux aux coins de votre bouche. C'est pourquoi personne n'avait seulement pensé dire un jour : Sa Majesté *******. Les sujets du royaume avaient assez de misères à supporter comme ça, ils préféraient se taire.
Donc, il se trouvait quelque part dans ce pays, loin du palais royal où elles n'étaient jamais invitées, deux princesses charmantes. La première se nommait Solène, elle aimait rêver toute éveillée à des choses aimables du matin au soir. La seconde avait nom Matine et rien ne lui plaisait autant que de dormir dans son boudoir. Son sommeil était ravissant : tous ceux qui venaient à passer sous sa fenêtre en étaient enchantés et se mettaient à bâiller des violettes embaumées. Comme ils attrapaient aussi les songes merveilleux de Solène, ils rentraient vite se coucher chez eux afin de prendre une heure de bonheur. Tout le monde aimait à prononcer les noms des princesses, car ils vous mettaient à la bouche une saveur de chocolat truffé et de vanille naturelle, sans conservateur.
Cela permettait d'oublier les tourments infligés par le roi *******. Celui-ci en inventait chaque jour de nouveaux, car c'était un homme très actif. «Prenez tous les vieux du royaume et qu'on les attelle aux charrues pour labourer, ça économisera l'essence», disait-il par exemple à son Grand Chancelier. Ou bien il ordonnait au Moyen Chancelier : «Que toutes les horloges avancent désormais d'une heure le matin et retardent d'une autre le soir, afin que mes sujets fainéants travaillent plus !» Il n'y avait pas de Petit Chancelier, mais un simple Chancelier du Tabouret, parce que le roi avait fait découper le mot petit aux ciseaux dans tous les dictionnaires. Il était interdit de le prononcer sous peine de finir accroché au mur du palais par son trou le moins grand.
Les deux princesses voyaient bien que le peuple était très malheureux : Solène entendait ses plaintes quand elle sortait rêver sur le balcon, Matine ne pouvait les ignorer au moment de prendre son petit déjeuner ou sa collation de la mi-journée. «Mon Dieu, comme ces gens souffrent ! Je vais dormir, parce que je ne sais pas quoi faire pour les aider», disait-elle.
Or, il advint une nuit que les rêves de Solène s'installèrent dans le sommeil de Matine, comme cela peut aisément arriver lorsque deux princesses sommeillent dans des chambres voisines. Matine s'éveilla en sursaut à potron-minet (ainsi appelait-on dans le royaume ce moment où le jour n'est pas encore grand), et courut trouver Solène. Lorsqu'elle ne dormait pas, c'était en effet une princesse énergique, ce que nous découvrons avec elle, car elle courait pour la première fois. «J'ai trouvé comment sauver le peuple : il faut couper la tête au roi, et puis faire des édits pour concrétiser toutes ces belles choses dont tu rêves !»
Couper la tête du roi, elles auraient bien voulu le faire, mais il y avait loin de l'intention au tranchant de l'épée… Comment affronter le roi lorsqu'on n'est que belles princesses fragiles et sans épée ? Elles sortirent du château et appelèrent le peuple à la rescousse : «Venez avec nous, et allons décapiter le roi !» cria Solène.
Le peuple les regarda d'un air hésitant, les têtes se baissaient et les pointes de souliers grattaient le sol avec gêne. Un homme moins timide finit par répondre: «Mon œil, jolies princesses ! Où sont vos muscles, où sont vos épées tranchantes ? On va se faire étriper par les chevaliers de *******, c'est tout !» Il ne prononça pas le nom, bien sûr, mais il cracha par terre et se gratta vigoureusement, parfaitement compris de tous.
Les choses en étaient là, et les princesses se disposaient à rentrer tristement au château, lorsque la nouvelle se répandit que le prince charmant Mimidoux venait de débarquer au port du Couchant. Le prince Mimidoux était un voisin de Solène et Matine, ils avaient souvent joué ensemble aux princesses et au docteur dans leur enfance. À l'âge adulte, le prince avait été envoyé par le roi combattre le dragon Krizz en pays sauvage, une façon de se débarrasser de lui. Depuis lors, on était sans nouvelles de Mimidoux.
Les princesses et le peuple se précipitèrent alors à sa rencontre… Après les bisous d'usage, le goûter de quatre heures, et quelques menues dispositions exigées par la situation, Mimidoux marcha sur le palais royal à la tête du peuple. Il bouscula les deux ou trois chevaliers qui n'avaient pas pris la fuite, puis du tranchant de son épée, il décolla le roi *******. Dans le pays entier ce ne fut qu'un cri d'allégresse : vive le roi Mimidoux !
Alors Mimidoux prit de sa main gauche celle de la princesse Solène, de sa main droite celle de la princesse Matine, et il les mena dans la chambre royale. Il les baisa et leur fit des tas d'enfants.
Moralité : aucune.
RépondreSupprimer-_-
Un petit bijou. Merci.
RépondreSupprimer(Je ne te savais pas à ce point entiché de Mimidoux)
;-)
et Mimidoux devint pire que *******, car c'était le même. Seulement, il s'appelait Mimidoux, lui.
RépondreSupprimerNonobstant, très beau billet (que j'eusse accroché avec fierté à mon blason ^^)
Mimidoux, il est trop fort.
RépondreSupprimerJ'adore la fin.
LhommeDebout, si: méfiez-vous des princes.
RépondreSupprimerDedalus, merci… C'est un conte d'avertissement, rien d'autre…
Toff, ben, il devint roi… Merci.
Homer, ça ne m'étonne pas, obsédé !
Bravo, bravo et encore bravo.
RépondreSupprimerCa mériterait d'être mis en images, tellement le scénario est en béton ! A quand une production Pixar ?
Merveilleux, enchanteur, sauf la fin, qui laisse un peu à désirer (niveau enchantement, je veux dire).
RépondreSupprimerEt alors, maintenant que Copé a confisqué le pouvoir à Sarkozy, il se passe quoi ?
Pas parce qu'il a fourré ségolène royale et martine Aubry que ses enfants ressembleront à Bernard Kouchner, hein, et qu'ils se fourvoieront dans un gouvernement de droite, non ?
(non sérieux, merveilleux billet)
Moralité ? Il n'y en a pas : Mimidoux et le roi******* partageaient les mêmes vues sur le monde, et au final c'est le peuple qui se fit baiser.
RépondreSupprimerThierry, merci de la visite (si vous connaissez du monde chez Pixar, passez leur le mot, j'encaisserais volontiers la chose).
RépondreSupprimerMike,
merci itou ! Hum, ton prince charmant me laisse perplexe…
Mouette,
bravo, je vois que vous avez tout compris.
On commence par baiser les princesses, mais que sont devenu les vieux dans leurs champs avec leurs charrues ?
RépondreSupprimertrès beau conte, que je m'en vais raconter a miss zyeux jaunes ce soir avant qu'elle aille dormir...
Que voilà un joli conte de Noël, ma foi!
RépondreSupprimerExcellent, Le coucou!
Mimidoux Mimiprix : mais il fait le maximum !
RépondreSupprimerLe slogan a déjà servi mais peut être recyclé ...
Epamin'
RépondreSupprimerc'est gentil, merci.
Solveig,
pourquoi pas recycler, mais côté mimiprix, j'ai un doute…
Lolobo,
RépondreSupprimerje t'ai oublié, désolé ! J'espère que Miss zyeux jaunes fera de jolis rêves ensuite…