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vendredi 29 avril 2011

Que faire du président ?

Pour ou contre une modification du scrutin présidentiel, voire une suppression de l’élection du président au suffrage universel ?
Romain pose dans son Variae cette question d'apparence iconoclaste et me demande d'y répondre. Elle méritait d'être posé, car l'élection présidentielle a beau être le monument sacré de la Cinquième, devant lequel se prosterne la nation, elle n'en est pas moins la source de tous les maux politiques de ce pays. À peine un nouveau président entre-t-il en fonction que la fièvre de l'élection suivante commence à couver chez les politiques ; souvent, elle brûle même certains (voyez Copé), dans les préparatifs d'une échéance plus lointaine. Il y a toujours une présidentielle à venir qui sous-tend la vie politique française et empoisonne petit à petit la république.

Le défaut majeur de cette élection découle de sa fausse apparence démocratique : elle a lieu au suffrage universel et donne donc au président une légitimité équivalente à celle de l'Assemblée Nationale où siègent les représentants du peuple. En réalité, par la lecture qui est faite de la Constitution et les pouvoirs qu'il peut s'octroyer, le président jouit d'une «légitimité» supérieure à celle du Parlement (pour le coup, joignons à contrecœur les sénateurs aux députés). Dire qu'il est roi l'espace de son mandat est devenu un truisme. Il est même davantage qu'un roi, puisque si les Français ont pu s'offrir dans le passé à plusieurs reprises le bonheur de dégommer des monarques, on n'a encore rien vu de tel avec leurs autocrates électifs —sous prétexte qu'ils disposaient au soir de leur élection d'une légitimité réputée acquise une fois pour toutes.

Le président, en particulier Nicolas Sarkozy, concentre tous les pouvoirs et n'est responsable de rien. Les représentants du peuple ne peuvent lui demander des comptes, et encore moins le révoquer. Par contre le président a la possibilité de dissoudre l'Assemblée : c'est cette menace majeure qui nous vaut des majorités de godillots, les unes après les autres.

Ceci dit, nous avons si peu de démocratie dans notre vie politique (nous n'en avons même aucune), que le sentiment de pouvoir choisir directement notre maître nous procure de la satisfaction. Rendre aux députés la faculté de désigner le président, comme c'était le cas dans la république précédente, nous semblerait un vol, il n'est pas facile de revenir en arrière. Pour ce faire, il faudrait changer de république et en ouvrir largement portes et fenêtres à la démocratie, enfin. Aux députés la désignation et le contrôle effectif de l'exécutif, aux citoyens le contrôle des effets de la loi sur leur vie quotidienne à travers le référendum d'initiative populaire.

Le problème, c'est que le passé nous a appris qu'une république purement parlementaire débouche à plus ou moins long terme sur l'instabilité gouvernementale et l'impuissance. C'est de cela autant que de la guerre d'Algérie qu'est sortie la constitution de la Cinquième République.
Alors, pour ma part, et dans les limites de ma grande ignorance politique, je me contenterais d'un président élu au suffrage universel, châtré constitutionnellement. Une n-ième révision de la constitution devrait le limiter étroitement à son rôle d'arbitre, et surtout le rendre responsable d'une façon ou d'une autre devant le Parlement.

Au fait, a-t-on vraiment besoin d'un président ?

(À noter : Melclalex, Isabelle et Nicolas ont déjà donné leur avis. J'aimerais bien avoir aussi celui d'Arnaud, d'un «Ruminances», ou de Le-gout-des-autres )

P-S: Merci à Gaël grâce à qui je vais pouvoir ajouter plus aisément de la musique sur mon autre blog… Après «Le jardin de la mairie», Christophe nous lâche face au mur du maquis

9 commentaires:

  1. Ayant été président moi-même, je peux affirmer que je ne sers vraiment à rien. Sauf à répondre comme Georges Charensol : "Je sers à me faire plaisir". Un rôle que remplit pleinement notre Nicolas Fouquet's. Au fait, tu pourrais quand même nous dire de quelle couleur était la robe de Kate et de la reine mère puisque tu abordes les problèmes de la monarchie !

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  2. Mtislav,
    Ah ! c'est pour ça que tous les présidents ont la réputation d'être sourds aux cris du peuple ! :-)
    Tout à fait entre nous: la robe de Kate était ivoire avec de la dentelle par-ci par-là, et celle de la reine mère jaune, comme son chapeau. J'ajoute que le prince portait une sorte de vareuse rouge. Et paf !

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  3. "Au fait, a-t-on vraiment besoin d'un président ?"

    C'est le bout de mon raisonnement ... et pour moi la réponse est "non", ou alors un président symbolique, comme en Allemagne par exemple.

    C'est une sorte de survivance de l'ancien régime, et je ne vois pas pourquoi il devrait y avoir, par définition, un homme au dessus des autres !

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  4. Non, on n'a pas besoin d'un Président. D'ailleurs les anglais s'en sortent très bien sans, ils ont des monarques qui servent à rien pour occuper leurs loisirs télévisuels.

    Ils n'ont même pas de constitution et s'en tirent très bien...

    Cela dit, je reviens sur la dernière partie du billet : "Une n-ième révision de la constitution devrait le limiter étroitement à son rôle d'arbitre". Il n'a déjà qu'un rôle d'arbitre. Ce sont tous les députés qu'il faudrait châtrer mais ils n'ont déjà pas les couilles de s'opposer au président.

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  5. Les gens se croient plus importants en allant voter pour un président que pour un autre suffrage. Ça leur donne l'impression de faire un acte militant, qui est pour la plupart, le seul qu'il feront en cinq années de vie. Période qu'ils passeront à critiquer leur choix sous prétexte qu'il leur a été imposé et qu'ils ont été trompés. Mais promis la prochaine fois ils voteront pour le bon...
    Faudrait pas priver les gens d'une occasion de se sentir des citoyens importants.

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  6. On pourrait déjà commencer par inverser le calendrier (ou plutôt le rétablir) : les législatives avant la présidentielle.
    Il semble que la présidentielle détermine le résultat des législatives. C'est du moins ce qu'on constate. L'inverse serait mieux.

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  7. Romain,
    c'est exactement ça: une survivance de l'ancien régime. D'ailleurs, la première constitution ne prévoyait pas de président : les révolutionnaires venaient de se débarrasser du roi, il n'était pas question de s'en infliger un succédané !

    Nicolas,
    entièrement d'accord, la fonction de président est à la limite du parasitisme, sauf si le poste de Premier ministre ne peut être conforté en cas de crise majeure. Un président a le mérite d'éviter en principe la vacance du pouvoir.


    Captainhaka,
    c'est une totale illusion de démocratie, oui, mais une élection au suffrage universel parle tout de même à l'imagination. Et supprimer cette participation directe des citoyens au choix du pouvoir exigerait de donner à ceux-ci en échange le référendum d'initiative populaire. Le régime parlementaire strict est un régime confiscatoire.

    Omnibus,
    l'habitude est maintenant tellement enracinée, qu'on voit mal un président se priver de ce moyen facile de gagner une majorité solide !

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  8. Ah j'ai noté le thème dans mes sujets à venir, je vais peut-être développer. En arrivant en Belgique je découvre un autre système de l'intérieur. Sans être parfait, il révèle quand les défauts du régime présidentiel français ! :-))

    [Cela dit, très bel article, je suis globalement d'accord avec toi ! Qu'est ce que c'est que ce type intouchable ? Ça ne me semble pas très dans l'esprit d'un "gouvernement par le peuple" ! :-) ].

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  9. M Poireau,
    tu devrais en profiter pour expliquer la constitution belge. On connaît toujours mal le fonctionnement de nos voisins, pour comparer. :-))

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