Monsieur mon écran, mon bel écran, qui chaque jour reflète mes bafouilles à tout-venant, dis-moi si ce que je t'écris a du sens?
— Il en a un peu, oh, grand couillon! Mais, de même que l'on reconnaît l'avant d'une voiture à sa situation diamétralement opposée à l'arrière, d'où découle pour l'observateur la sensation valorisante de comprendre le sens de la
marche… Tu me suis?
— J'essaye.
— Pff ! Donc, ainsi que même un borgne se sentira intelligent d'identifier l'apha et l'omega d'un véhicule, il faut que lecteur appréhende où tu vas.
— Si je suis bien ta métaphore, mes billets sont des tas de ferraille qui vont au but comme les crabes?
— Voilà.
— Ils y arrivent, au but !
— Pff ! Je ne dénoncerai personne, mais je connais de tes lecteurs qui s'emmerdent.
— M. mon écran, dis-moi: comment faut-il faire, alors?
— Facile, prenons une information saillante de l'actualité de ce jour… Tiens, le
Nouvel Obs annonce que M. Sarkozy va réformer l'hôpital psychiatrique. Il veut que ce soit les préfets ou les juges qui donnent les autorisations de sortie…
— Ouais, bon!
Le Monde en parle aussi et tous les journaux avec eux, je suppose.
— Tu peux y ajouter la radio et la télévision, c'est une information qui va plaire au bon peuple de France.
— Et qu'est ce que j'en fais, alors, je répète ce qu'ils disent tous?
— Évidemment, et n'oublies pas de citer au moins une phrase du président, comme celle où il précise qui doit décider si un patient peut sortir :
«ce doit être l'Etat ou, dans certains cas la justice, pas l'expert»…
— Je me refuse à imiter ces blogueurs dont le manque de créativité m'inspire pitié!
— Et que pourrais-tu faire d'autre, vieux couillon?
— Sur l'instant, là, au fil de la plume, je ne sais pas trop… Je me verrais bien mettre en scène une commission présidée par un préfet, tiens. Comme il s'agirait d'une caricature à charge, le préfet et ses assistants apparaîtraient bornés et ridicules, au contraire du schizophrène stabilisé, un tantinet farfelu mais sympa, qui comparaîtrait devant eux. Je pense que tout mon discours consisterait à rendre totalement absurde le fait de confier à des fonctionnaires, gavés de préjugés, le pouvoir de décider si un individu gâcherait, ou non, le paysage de ses concitoyens, une fois libéré. Parce que c'est ce qu'il me paraît important de souligner : sur le plan médical, ces gens seront aussi compétents que moi en physique. Je sais que E=mc2 parce qu'on me l'a dit, et je sais, grâce à M. Einstein, qu'en train le temps passe plus vite en compagnie d'une jolie fille qu'avec une vieille égrenant son chapelet. Cependant, mes connaissances seraient très insuffisantes pour que je puisse prévoir, à l'observation directe d'une étoile, si elle va péter demain en supernova…
— Ça ne vaut pas un pet de lièvre de Mars ! Heureusement, que je suis là, tu aurais encore perdu ton temps à des
âneries. Allez, grand couillon: prends ta plume et fais-moi un billet convenable, propre sur lui, et tout.
—Pas question, d'ailleurs je suis de mauvaise humeur aujourd'hui!
— Ah, pourquoi?
—J'ai mes raisons, c'est personnel. Et si on te questionne, tu diras que c'est à cause du gars qui a utilisé mon article sur le sida, hier. Il n'a même pas eu la courtoisie de se fendre d'un commentaire! Ça me fiche en rogne, d'autant plus qu'il a dénaturé en partie le sens de mes propos. J'avais parlé d'organiser un «
civithon», pour quêter en faveur des élus en général, et écrit que
«nous aurions ainsi l'occasion démocratique de traiter nos élus selon notre degré de satisfaction». Eh bien, ce monsieur a préféré substituer
"Élyséethon" à
«civithon», et censuré mon allusion —certes perfide, mais la mienne—, à l'ensemble des élus, pour ne plus viser que Nicolas Sarkozy. Alors, je dis: bas les pattes! quand on pique un texte, on n'en change pas le sens. C'est comme pour l'image de ta bagnole, tout à l'heure: j'avais bricolé un prototype d'avenir, amphibie, écolo, et il me sort à la place un tracteur diesel!
PS: Sara Palin chez
Quicoulol, c'est par ici…