lundi 24 janvier 2011

C'est le billet le plus difficile de tous ceux que j'ai rédigés et publiés ici. Je ne sais pas trop comment l'écrire, je ne souhaitais d'ailleurs pas le faire, mes enfants m'ont persuadé que c'est mieux ainsi. C'est le premier billet que ma femme, Marcelle, Sara Perriod-Fraysse, n'aura pas relu avant publication. Chaque soir, depuis le premier jour d'existence de ce blog, elle a été ma première lectrice, ma correctrice souvent, critique parfois. Elle a souvent soupiré sur mes abus du «moi je», nous nous sommes parfois engueulés à propos d'une phrase : ce qui arrivait de temps à autre depuis plus de quarante années passées à écrire ensemble. Elle et moi : c'est comme ça que nous vivions. C'est fini, parce qu'il me faut lâcher maintenant ce mot qui nous fait si mal, à nous, ses enfants et moi, elle est morte depuis samedi matin.

mercredi 19 janvier 2011

Paris lâche la bombe C sur Haïti

N'êtes-vous pas étonnés par le chassé-croisé de dictateurs dans l'actualité de ces derniers jours ? Moi, si. Il y a d'un côté Ben Ali qui s'enfuit de son pays, et de l'autre Bébé Doc Duvalier retournant dans le sien par surprise… Dans les deux cas, le moins que l'on puisse dire, c'est que la Maison Sarkozy n'a pas brillé par son flair —il vaut mieux laisser la morale de côté.

Prenons l'exemple de Bébé Doc : en Haïti, et sans doute dans beaucoup de capitales, certains se demandent à quoi joue la France. L'Élysée a-t-il vraiment laissé partir Duvalier par simple incompétence, ou bien visait-il à semer un peu plus de désordre dans un malheureux pays au plus mauvais moment, et pourquoi ?

Quand un personnage de l'acabit de l'ancien dictateur haïtien réserve un billet d'avion, on ne peut douter que le gouvernement et la présidence en soient immédiatement informés. On nous dit que «la France» n'a pas l'habitude de contrôler les mouvements de ses citoyens ou des résidents étrangers… Voire ! Il faut bien admettre cette explication, à défaut de comprendre l'intérêt que la Maison Sarkozy pourrait trouver à lâcher une bombe de corruption sur un pays déjà dévasté.

Les médias haïtiens évoquent la possibilité que Jean-Claude Duvalier soit rentré pour rétablir ses finances en très mauvais état… Songez que les Suisses ont gelé les fonds qu'il détenait chez eux : peut-être a-t-il fini de vider ses poches chez nous, dans sa longue villégiature niçoise?
Et à propos de sous, de ceux des dictateurs en particulier, notons que Mme Lagarde prétend qu'il n'est pas possible de bloquer chez nous la fortune de la famille Ben Ali. Pendant ce temps, en Suisse, le Conseil fédéral vient justement de bloquer les fonds de Ben Ali et Laurent Gbagbo, avec effet immédiat…

P-S : j'ai obtenu le portefeuille des Institutions et d'un tas de trucs rigolos dans le gouvernement Wiko de Nicolas. Sans tarder, comme premières propositions, je vous recommande trois lectures : le Journal de Turquie chez Zoridae, Marre chez Dedalus, qui fait écho à Fachée de Christophe…

mardi 18 janvier 2011

Il ne faut pas voir le mal partout

L'opposition a tort de se scandaliser des propos de Michèle Alliot-Marie, le 11 janvier. Pour mémoire, elle suggérait d'offrir le «savoir-faire français reconnu dans le monde entier» à la police tunisienne. Certes, c'était un peu maladroit dans la formulation, mais y avait-il vraiment matière à crier démission ? L'esprit de notre ministre des Affaires étrangères, politicienne expérimentée, pouvait-il abriter le noir dessin de secourir Ben Ali ? Bien sûr que non, voyons ! La vérité est plutôt à rechercher dans son souci louable de protéger les villas de la jet-set française en Tunisie. Pour la ministre, il n'était certainement question que de simple gardiennage.

Toujours à propos de la Tunisie, dans un commentaire à mon billet d'hier, Suzanne trouvait rassurant «que des ministres de l'ancien gouvernement participent au nouveau. Pas d'épuration, pas de tribunaux hâtifs, alors qu'une dictature est tombée.» Sans doute a-t-elle raison pour la deuxième partie de sa remarque. En revanche, j'aurais trouvé plus rassurant (pour les Tunisiens), que les anciens collaborateurs de Ben Ali restés en fonction soient nommés à d'autres postes. Par exemple, que le premier ministre soit plutôt affecté à l'enseignement supérieur ; le ministre de l'intérieur, au développement régional ; celui des affaires étrangères, à la santé


lundi 17 janvier 2011

Si j'étais Tunisien, mais je ne le suis pas…

Heureusement, les événements de Tunisie ne me regardent pas autrement que par l'élan de sympathie mâtiné de curiosité qu'ils me suscitent. Je peux donc en parler dans le bienheureux état d'irresponsabilité qui permet d'émettre des avis titrés au même degré que le verre que l'on siffle au comptoir.

Si j'étais Tunisien, je serais amer et même furibard à l'annonce de la composition du nouveau gouvernement. Pourquoi ? Eh bien, trois ministères clefs demeurent aux mains de l'ancienne fine équipe de Ben Ali : la tête du gouvernement, l'intérieur, les affaires étrangères. D'autre part, sur 19 ministres, on ne compte apparemment que trois représentants de l'opposition, appelés à des fonctions de second plan dans une période aussi cruciale : le développement régional, l'enseignement supérieur, la santé.

Le fait d'avoir été totalement écartée du pouvoir pendant aussi longtemps inflige sans doute un handicap à cette opposition privée d'expérience. Il doit aussi y avoir parmi les autres nominations des gens peu suspects de collaboration avec le régime dictatorial… Néanmoins, on voit déjà qu'il s'agit de rassurer les capitales étrangères et les ex-grands amis de Ben Ali : leurs intérêts seront préservés.

Le plus choquant réside peut-être dans l'annonce du premier ministre que tous les partis politiques qui le demanderont seront légalisés. On peut donc supposer que l'ancien parti de Ben Ali ne sera pas dissous, ce qui signifie que sa formidable puissance, son quadrillage serré du pays, demeureront intacts pour les prochaines élections.
Conclusion : Moncef Marzouki, vieil opposant à l'ancien régime, doit avoir raison de parler de mascarade, et j'ai certainement tort de parler de ce que je ne connais pas.

J'aurais mieux fait de m'en tenir à ma première idée d'un billet sur l'illettrisme : 8 % des salariés français sont illettrés. L'ayant constaté, les employeurs leurs proposent des formations aux «savoirs de base» et autres «compétences clés», des appellations destinées à ménager leur fierté. On suppose qu'être traités d'ignorants blesserait ces malheureux. Et pourtant, un tel choc serait peut-être salutaire : ces 8% ont dû peser lourd dans l'élection en 2007 d'un Sarkozy, probablement perçu comme un frère qui a réussi. En marge de l'article de l'Express qui a inspiré cette réflexion, j'ai noté l'annonce d'un supplément : «Carla Bruni-Sarkozy est prête à s'engager dans la lutte contre l'illettrisme.» Pardi ! Elle est déjà à l'œuvre.

dimanche 16 janvier 2011

C'est l'heure de trancher…

Le héros du rébus de ce dimanche se prénommait aussi Marie Isidore, mais son prénom usuel était déjà trop compliqué à illustrer pour ne pas négliger une partie de sa batterie d'état-civil. Si cela avait été en mon pouvoir, cet homme serait entré au Panthéon depuis longtemps, quitte à virer du monde pour lui faire de la place. Malheureusement, seul l'Être Suprême aurait pu accomplir cet exploit : d'une part sa dépouille a disparu dans la chaux vive, et d'autre part tous ses successeurs jusqu'à aujourd'hui, sans exception, n'avaient d'autre préoccupation que de trahir sa mémoire et de dénaturer son héritage.

Ceci dit, nous avons le plaisir d'informer la blogosphère, et même la nation, que les citoyens et citoyennes suivants ont trouvé la bonne solution :

Omnibus, Solveig, Nefisa (laquelle ayant provisoirement bouclé son blog, on ne sait plus où la loger), ZapPow, La famille Castor, Olympe, Bérénice, Mtislav, Epamin', et Passante !

Gloire à eux !

Le rébus du dimanche n°88


Trouvez dans ce rébus le prénom et le nom d'un personnage politique qui peut être notre contemporain ou appartenir à n'importe quelle période historique d'un quelconque pays… Les commentaires seront modérés jusqu'à ce soir.

vendredi 14 janvier 2011

Frère Klaus, ne vois-tu rien venir ?


Le forum de Davos débutera dans deux semaines… Klaus Schwab, son patron, est une sorte de pape de l'économie. Si, si ! Ce jugement n'est pas fondé sur l'estime que m'inspirerait la dite économie, située sur l'échelle scientifique quelque part entre l'astrologie et la cordonnerie, mais sur le personnage.

Chaque fois qu'un portrait de cet homme est publié, on le voit saisi dans une pose apostolique, mains expressives, regard missionnaire. Vous me direz que Sarkozy aussi, a le geste expressif à l'italienne. Oui, mais rien de papal dans son cas, simplement de la redondance et l'appétit du croque-mitaine dans la prunelle. Quoi qu'il en soit, là n'est pas la question, elle se trouve dans l'économie, ou plutôt juste à coté…

M. Schwab, qui vient d'accorder une interview au Temps, dit des choses intéressantes: «L'excès de dette des propriétaires de biens immobilier et des consommateurs a été reporté sur les banques, qui l'ont transféré aux gouvernements, qui sont en train de le reporter sur les contribuables»… Bien sûr, nous savions cela déjà, mais sorti de la bouche du patron de Davos, c'est plus savoureux, non ? Surtout, M. Schwab admet que «cela produit une crise sociale», et voit «venir une révolte de la jeunesse, une sorte de nouveau «Mai 68»» Bon, le reste est à lire sur Le Temps, mais M. Schwab ne dit pas à quelle date il situe la révolte. S'il a vraiment le flair d'un économiste, alors Zine Sarkozy peut dormir tranquille : ce sera pour le siècle prochain, au plus court.

P-S: merci à Dedalus de signaler un billet de Zette qui m'avait échappé mercredi, mais celui d'aujourd'hui est bien aussi ! Anticor sera partie-civile dans l'affaire Karachi… Enfin, je vous invite à lire le dernier texte de Xavier Fisselier : Mn (XXIV).