vendredi 3 juillet 2009

À la recherche du modèle Français

La lecture de l'entretien placé par Nicolas Sarkozy dans le Nouvel Obs, a ramené le «modèle Français» au premier plan de mes interrogations. Cela fait longtemps que cette notion nous est servie par les médias, et à les lire, on finit par ne plus trop savoir ce qu'elle recouvre. Dans l'esprit de la plupart des gens, cette notion vient sans doute des bienfaits de «l'état providence», du haut niveau de protection sociale auquel nous étions parvenus avant que ne s'impose la mondialisation. Mais à peu près tous nos voisins européens bénéficiaient d'une protection plus ou moins comparable en matière de santé, de chômage, de lois du travail… On pourrait y adjoindre l'importance des services publics, en aboutissant au même constat: nos voisins ont, ou avaient, à peu près les mêmes. Qu'avons-nous donc qu'ils n'ont pas, alors? Nous avons la république, c'est à dire un esprit républicain hérité des révolutionnaires de 1789, parvenu jusqu'à nous de génération en génération. C'est un idéal, ce pourquoi nos amis européens, souvent pragmatiques, nous comprennent parfois mal et nous raillent. Un idéal pétri de laïcité sourcilleuse, et d'attachement théorique aux symboles que sont les instruments de la souveraineté populaire: nos institutions. Attachement théorique, car en réalité n'a jamais cessé de sourdre dans notre peuple une exigence de démocratie restée inassouvie. Et cela donne des citoyens aisément frondeurs, dirigés par des élus s'estimant investis de leur souveraineté. S'il se limitait à cela, ce modèle républicain Français serait fondé sur un malentendu. Sans doute faut-il y ajouter tout de même le besoin de se reposer sur l'état pour maintenir un haut niveau de justice sociale à travers, par exemple, des organismes de gestion collectives et non marchandes.
C'est en tout cas ce modèle que Nicolas Sarkozy voulait jeter à bas en arrivant à la présidence. Ce qu'il a commencé à faire en avançant les premiers éléments d'une privatisation forcée de la santé, ou des services publics.
Aujourd'hui, la crise ayant explosé, il nous annonce qu'il a commis des erreurs… Il a changé et la défense du modèle Français lui tient désormais à cœur. Faut-il le croire?
Eh bien, je suis personnellement troublé, car à l'observer attentivement, je constate qu'il a en effet quelque chose de changé






jeudi 2 juillet 2009

L'Obs lance un nouveau bidon de Sarkozy !

Je suis abonné au Nouvel Obs, que je reçois du reste souvent en retard. Ainsi j'ai pris connaissance de l'opération «Nouveau Sarkozy» sur le site de l'hebdomadaire, hier, avant de pouvoir la lire seulement aujourd'hui in extenso.
M. Sarkozy chantait victoire au lendemain des européennes pour avoir remporté le maximum de sièges grâce aux voix d'une infime proportion du corps électoral. Fort bien, c'est une attitude compréhensible. Le bon moutonnier aussi, sait qu'il lui faut tenir son troupeau rassemblé quand le chemin du pâturage est encore long. À l'évidence, cependant, M. Sarkozy n'en a pas moins conscience que 60% de la population ne lui fait aucune confiance et le rejette. On comprend que ses conseillers et lui se soient souciés de travailler à changer cet état de choses.
Comme on sait, Nicolas Sarkozy regrette de n'avoir pas su se tenir dans son beau costume de président. Au début, dit-il. Sans doute ses mauvaises manières ont-elles contribué au désamour des Français à son égard, mais il est regrettable qu'il reste aveugle aux raisons profondes de ce rejet: la totalité de ce qu'il appelle son bilan, et dont il ne regrette rien. Je ne vais pas revenir une fois de plus sur tout ce que l'on peut lui reprocher, et que d'autres rappellent fort bien. Je préfère m'attarder sur cette étonnante interview.
Plusieurs choses me choquent dans ce numéro d'un hebdomadaire que je lis depuis des années. La première, c'est qu'il s'agit d'une opération promotionnelle à laquelle le journal se prête sans avertir le lecteur. Hier et ailleurs, sur le thème de l'argent que peuvent gagner quelques blogueurs en rédigeant de la publicité rédactionnelle, des commentateurs convenaient qu'il n'y a aucun mal à cela du moment que le lecteur est prévenu.
Ici, nous avons un président qui vient se présenter comme une nouvelle lessive dont on aurait changé l'emballage, et le Nouvel Obs s'abstient de signaler à ses lecteurs qu'il s'agit d'une opération de communication. Le baril est peut-être différent, mais les ingrédients sont les mêmes!

Certes, l'interview est introduite par un texte en rouge, qui souligne que cet «entretien est aussi une tribune», mais à moins de prêter attention à ses ambiguïtés dans la formulation, on pourrait presque croire que le journal est à l'origine des confidences du président, et non l'Élysée: «Cela nous a conduits à rencontrer Nicolas Sarkozy. Nous voulions qu'il s'exprime, qu'il dise s'il y avait vraiment un changement et ce qui l'avait motivé, qu'il s'explique sur ce qui nous apparaissait comme une stratégie nouvelle».
Pire, les journalistes politiques de l'hebdomadaire ont été tenus à l'écart d'une opération gardée secrète par le PDG et le directeur de la rédaction. La Société des rédacteurs du Nouvel Observateur peut ainsi parler de «dérive sarkophile»

Par respect pour les lecteurs d'un journal justement choisi le plus souvent parce que d'ordinaire ses «colonnes (…) ne (…) ménagent pas» le pouvoir actuel, on aurait aimé que l'entretien fut d'une part moins complaisant. D'autre part, qu'il soit suivi d'une réponse critique immédiate, accordée à la rédaction politique. La couverture du journal titrant «Nicolas Sarkozy face à l'Obs» y aurait gagné en crédibilité.

P-S. À lire chez Hermes: «De la magie en politique» , et une perle à suivre pour retrouver tous les billets d'Éric sur le «blogging»: conseils blogging


mercredi 1 juillet 2009

Les héros aussi, veulent être aimés!

Dans une actualité qui reste aujourd'hui particulièrement éprouvante, puisque l'on ne sait toujours pas comment la dépouille de Michael Jackson sera inhumée dans son ranch de Neverland, et si la lecture du testament sera retransmise à la télévision, j'hésitais à m'exprimer ici.
À quoi bon rajouter des lignes à la douleur de millions de Martiens éplorés, au risque de les faire souffrir davantage, et même si personne ne lit mon blog sur Mars?
Et puis j'ai pensé qu'il y avait quelques mots à dire, tout de même, pour apporter un peu de réconfort à mon prochain. On apprend en effet que deux dirigeants qui comptent ont trouvé leur chemin de Damas et se sont engagés sur la voie du bien.
Le premier se nomme Lars Olofsson, un quinquagénaire Suédois. Il est le nouveau directeur général du groupe Carrefour. M. Olofsson est en pointe d'une certaine actualité, car il a décidé que Carrefour veut désormais être aimé. Oui, oui, parfaitement! Ce réseau de nasses à chalands, ce ramassis de hangars sinistres que l'on fréquente le plus souvent hébété, en poussant son caddie comme un zombi, quand on n'y passe pas au galop, en essayant de contenir sa fureur d'être pris pour un con, Carrefour donc, veut qu'on l'aime!
Le nouveau patron a son plan, il a décidé de nous «enchanter tous les jours»… Et notamment en agissant sur les prix, que les consommateurs trouvent trop élevés, car le groupe se serait un peu trop concentré sur la qualité. Là, on croit rêver! Qui ne s'est jamais fait avoir par le prétendu engagement de «qualité» de Carrefour, en achetant des fruits «murs à point», en réalité immatures et dépourvus de goût? Ce n'est qu'un simple exemple, bien sûr: il faudrait un billet-fleuve pour dresser un catalogue exhaustif de récriminations.
Rendre la grande distribution sympathique est une tâche digne d'Heraclès nettoyant les écuries d'Augias, mais M. Olofsson ne compte sans doute pas y parvenir en un jour…

Le second héros à l'antique de ce jour, c'est Nicolas Sarkozy. Ce n'est pas la France qu'il espère faire aimer, pour sa part, mais lui-même. Dans une interview accordée au Nouvel Obs, il nous apprend qu'il a commis des erreurs d'appréciation, pour le cas où cela nous aurait échappé. Il a une excuse: c'est qu'il lui a fallu du temps «pour se hisser à la hauteur d'une charge (…) proprement inhumaine», rien que ça!
Et d'ironiser, mine de rien, sur le fait que les Français auraient développé une «exigence nouvelle» en matière d'austérité de mœurs exigées du président. «Je n'observe pas qu'on avait la même, par exemple à l'égard de François Mitterrand; donc les temps ont changé, on vit un nouvel âge de la démocratie», a-t-il dit.
On aurait aimé que les interviewers lui fissent observer qu'en la matière, le modèle-étalon, était le premier président de la Ve république, Charles de Gaulle. L'homme qui avait fait installer un compteur EDF à l'Élysée pour payer la consommation de son appartement privé, et qui ne mélangeait jamais ses dépenses personnelles à celles de sa fonction.
Certes, de Gaulle, ce n'était pas un petit marrant, mais, la vie est injuste: il était né avec la stature et la dignité innée qui conviennent au représentant du peuple souverain.

mardi 30 juin 2009

Il n'y a qu'une France!


Notre pays est exceptionnel, j'irais même jusqu'à dire que la France est unique. Et je peux le prouver: ouvrez n'importe quel atlas géographique et essayez de trouver une autre France… Il n'y en a pas deux!
Plus fort encore: faites une recherche Google, et vous constaterez avec un peu de patience que sur 873 000 000 de résultats, une fois éliminés les pseudonymes et diverses scories, c'est toujours à notre France quevous reviendrez.
Toujours plus fort: le dimanche, nous sommes le seul pays du monde où, à Paris, c'est fermé! Effacez donc cette moue dubitative, car j'ai un témoin digne de foi. Vous pouvez aller tous les dimanches de Paris Arkansas, à Paris Yukon, en passant par Paris,Texas, vous verrez que c'est ouvert. Tandis que dans le nôtre, de Paris, c'est bel et bien fermé.
J'entends déjà ricaner les mauvais esprits! Ils vont dire que j'habite en province et que je n'ai pas été à Paris depuis un bout de temps. C'est exact, mais, je vous avais prévenu: j'ai un témoin…
«Tous ceux qui soutiennent le président Obama étaient présents, très bien. Qu’ils aillent maintenant leur expliquer pourquoi le dimanche nous sommes le seul pays où, à Paris, c’est fermé» a déclaré mon témoin.
Ce témoin est le président de la république, Nicolas Sarkozy en personne!
Non, vraiment, je l'affirme: la France est unique. Sinon, trouvez-moi un autre pays dont le président, le suprême ayatolah, le dictateur, le roi, ou la reine, s'exprime de cette façon? Moi, je n'en connais pas.

D'un autre côté, il y a un terrain sur lequel nous sommes moins singuliers, quoique encore remarquables: c'est celui du mauvais accueil des touristes. Nos commerçants des régions de villégiature ont souvent une piètre réputation. Sur la Côte d'Azur par exemple, les aoûtiens, parfois aussi surnommés les congépayés, autrement dit la France laborieuse qui déferle et se retire à dates fixes, a mauvaise réputation auprès du boutiquier moyen, lequel lui reproche d'encombrer les rues sans dépenser suffisamment. «Ces salauds qui bouffent un cornet de frites à deux» ai-je entendu un jour de mes oreilles. C'est pourquoi, il me semble que le président Sarkozy a eu tort de s'énerver, sous prétexte que Mme Obama et ses filles ne trouvaient pas de boutiques ouvertes à Paris, un dimanche. Notre réputation n'est plus à bâtir.
N'allez pas imaginer de cette digression acide que je sois favorable au travail du dimanche. Certes non! Il faudrait que je sois gonflé pour cela, vu que le dimanche, moi je me repose. Même ici: je fais un rébus, c'est tout.
Je voulais simplement dire que la fermeture dominicale aurait dû être présentée à Mme Obama comme une particularité gauloise, inchangée depuis Vercingétorix. Les services du protocole pouvaient fort bien l'éclairer en ce sens en détournant son shopping vers quelques boutiques arabes pour des achats de dattes et d'épices. En outre, religieuses comme le sont tous les Américains, les demoiselles Obama et leur mère auraient été édifiées d'apprendre que le Jour du Seigneur n'est pas un vain mot chez nous.
Au lieu de cela, Le Soir de Bruxelles nous apprend que Nicolas Sarkozy en personne a passé «un coup de téléphone pour les faire ouvrir», ces magasins parisiens! Trouvez-moi un autre pays, où le président de la république téléphone aux boutiquiers du coin pour qu'ils lèvent le rideau en vitesse —à part peut-être en Afrique, ou en Chine! Il s'est promis de «régler le problème avant l'été», le président.
Alors, la France sera aussi le seul pays au monde où l'été commence le 14 Juillet…
source image

P-S. À lire sur Le Pavé, d'autres nouvelles de Karachi, et suivre la perle d'Hypos qui répertorie la plupart des articles sur ce même sujet: KARACHI



lundi 29 juin 2009

Revue de presse chez Nicolas 1er


Un beau matin d'été, le ciel déployant sur le palais impérial sa robe de madone, d'une virginité mariale, le bon Saint Henri entra dans la chambre de Leurs Majestés. Il posa le plateau du petit déjeuner sur un guéridon et ouvrit les doubles-rideaux, tandis que l'impératrice Lala cachait sa noble tête sous l'oreiller et que l'empereur se dressait en sursaut.
Nicolas 1er cligna des yeux et lança un jovial: «Putain, Riton! Tu pourrais frapper avant d'entrer!» À quoi son fidèle conseiller répondit: «J'avais les mains prises, j'ai donné un coup de pied dans la porte, sire.» L'empereur fit une moue dubitative, et dans un silence magnanime, s'adossa à la tête du lit pour recevoir le plateau du petit déjeuner sur les genoux.
«Bon, t'as lu la presse? reprit-il avant d'attaquer un croissant avec un génial appétit. —Oui, sire: la Une entière du Journal est consacrée au triomphe prévisible de votre Grand Emprunt National. —Ouais, bon! tu diras au journaliste que je suis content, mais je parlais pas du paillasson… La presse de l'étranger, ça dit quoi? —Ah! Il n'y a rien sur nous, sire… Les gazettes œuropéennes n'ont d'intérêt que pour les soucis du président Français avec l'affaire de Karachi. —Tant mieux alors! Pendant ce temps, ils ne médisent pas de moi… Et y a du nouveau? —Pas grand chose, sire, juste une déclaration de l'ancien premier sapir…, heu, ministre, je veux dire. Chez eux on dit: ministre.—Ouais, j'avais pigé, enchaîne. —Eh bien, M. Balladur dément avoir bénéficié de la moindre rétro-commission pour sa campagne électorale. Il est disposé à le répéter devant la justice, s'il le faut…»
Le Bien Aimé avala une bouchée de croissant avec le fond de sa tasse de café, reposa celle-ci, et dit, essuyant une moustache brune à sa lèvre: «Remets-moi du café, Riton… T'y crois, toi, à ce mensonge? —Si je puis me permettre, Votre Majesté… Avec un homme politique, surtout Français, le risque existe toujours qu'il dise la vérité. —On sait! Mais t'y crois? —Ben, il se peut que ça soit vrai, sire… Que son directeur de campagne, hem, votre homonyme, si je puis me permettre… —C'est fait, tu t'es permis, alors continue. —Il se peut que son directeur de campagne, Nicolas Sarkozy, ait eu assez d'argent à sa disposition pour se passer de financements occultes… —Ça arrive en France, ça? —Nulle part, à vrai dire! Souvenez-vous, sire, chez nous, du temps de la république, les candidats à la présidence dépensaient des sommes si folles, qu'ils devaient contracter des emprunts et partir à la pêche aux fonds sans trop se soucier de leur origine. —Alors? —Alors, il se peut aussi que ça soit faux… Ces jours derniers, les médias français disaient que le contrat avec le Pakistan était une mauvaise affaire. Le marché s'est soldé par d'énormes pertes pour les Français, 70 millions d'euros, par là… Ceux qui l'avaient étudié et préparé en avaient averti leur hiérarchie. Et pourtant, un mauvais contrat a été signé par la France! Étrange, non? On pourrait presque penser qu'ils ont pris cette décision parce qu'il fallait rapidement détourner de l'argent vers la caisse de campagne électorale. —Ouais, il y avait une clause qui les obligeait à verser les pots de vin dans l'année de la signature, hein? —La mémoire de votre majesté est magnifique! Quant à moi, je l'avais oubliée, cette clause… —Tu penses quoi, alors? —Sire, je ne juge jamais les puissants! se récria le bon Saint Henri, la main sur le cœur. —Ouais, mais là, c'est un ordre, Riton. —Soit, votre majesté: M. Balladur porte toujours des chaussettes rouges… —Mais encore? —Rien d'autre, sire. Ses chaussettes sont très belles, et je pense que j'aimerais connaître l'adresse de son fournisseur.»

PS. Après mes lectures de ce jour, je recommande le billet d'Hermes, «Mort aux profs!» , et celui de Ruminances, «Le back-slide penche à droite !»

dimanche 28 juin 2009

Rébus du dimanche


Trouvez le prénom et le nom d'un homme politique, cachés dans ce dessin…

samedi 27 juin 2009

Karachi, et maintenant?

L'affaire de Karachi n'est pas près de quitter l'actualité, ou du moins le bruit de fond qui accompagne celle-ci lorsqu'un dossier brûlant met le pouvoir et les grands médias mal à l'aise. Je reviens pour ma part sur l'essentiel de ce que l'on sait, ou croit savoir, des circonstances troubles qui ont précédé et suivi cet attentat dans lequel 11 Français ont trouvé la mort. Des familles de ces victimes ont d'ailleurs ouvert un site qui expose les faits et publie les informations dont elles disposent… En attendant que la vérité se fraye un chemin vers nous, si cela est encore possible dans notre république, on peut s'interroger sur l'importance que revêt l'élucidation complète de l'affaire.

Elle avait débuté en 1994 avec la vente par la France de trois sous-marins au Pakistan —une vente à perte, qui plus est! Le premier ministre d'alors était Édouard Balladur, et Nicolas Sarkozy le ministre du budget. C'est l'époque où M. Balladur, trahissant la confiance de Jacques Chirac, se prépare à affronter celui-ci dans l'élection présidentielle. C'est dire qu'il aura besoin d'argent pour faire campagne!

Dans les négociations qui accompagnèrent le contrat d'armement, il fut convenu le versement de commissions à des officiers Pakistanais. Nicolas Sarkozy, ministre du budget, aurait alors donné son accord à la création d'une société écran au Luxembourg, pour faciliter la sortie des bakchichs. Le paiement de commissions à des tiers était, semble-il, légal à l'époque du marché, ce qui ne laisse pas d'étonner, puisque leurs bénéficiaires furent par la suite condamnés au Pakistan.

Comme l'on sait, M. Balladur fut battu en 1995, et Jacques Chirac, une fois élu, donna l'ordre d'annuler le versement des bakchichs restant à payer. Ce que confirme Charles Millon, son ministre de la défense. Une décision qui aurait motivé l'attentat contre les ingénieurs Français de la DSN en poste à Karachi, attentat après lequel le président Chirac déclara qu'il ne «céderait pas au chantage»…

Ici commence l'incertitude, puisque l'on nous dit aujourd'hui que M. Chirac comptait assécher ainsi le trésor de guerre amassé par M. Balladur pour sa campagne électorale, qu'il soupçonnait d'être alimenté notamment par des rétro-commissions d'origine pakistanaise. Cela reste à prouver, d'autant que, M. Balladur étant battu, on ne voit pas ce qu'il aurait pu faire d'une cagnotte douteuse, mais c'est une explication plausible. Comme il paraît illusoire d'attendre de M. Chirac qu'il la confirme, ce ne peut-être qu'en remontant la piste des rétro-commissions que les enquêteurs pourraient éventuellement déboucher dans les comptes de campagne de M. Balladur…
Auquel cas, Nicolas Sarkozy, directeur de campagne du candidat à la présidentielle Balladur, se retrouverait également impliqué. Et si les bakchichs dans le sens France-Pakistan n'étaient pas illicites, il en irait tout autrement de ceux ayant accompli le trajet inverse. Pour vous et moi, cela se terminerait en prison. Pour le plus haut personnage de l'état, dès lors mêlé à une affaire de corruption, disons que ce serait inadmissible. Oui, mais voilà: le domaine du Secret Défense protégeant les documents délicats, déjà souvent opposé aux enquêteurs, sera prochainement étendu et renforcé…
La vérité est d'abord due aux familles qui ont perdu un être cher dans l'attentat de Karachi, mais elle est due aussi aux Français, qui doivent savoir si celui qui les gouverne est digne ou non de sa fonction.

Les blogs traitent largement du «Karachigate», je vous propose une sélection de billets qui constituent autant de sources du mien:
Ce que l'on sait de l'affaire Karachi

De l'attentat de Karachi à Nicolas Sarkozy

Karachi, ce que Nicolas Sarkozy savait
Le mystère Marin du panier de crabes

Karachigate: On nous prend pour des cons
Et une superbe fiction sur le même sujet:
Les raisons [dans mon état !]

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