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jeudi 7 juillet 2011

Tout écrit avec les orteils

Voilà encore un jour où j'ai traîné des pieds avant de les poser sur le clavier. Pourtant, il y aurait de quoi faire aujourd'hui, avec le rapport de la Cour des comptes qui scelle l'incompétence de Sarkozy en matière de sécurité… Ce qui me fait penser qu'en ranimant l'ordinateur, je me suis trouvé devant un jeu de Rue89 : «de quelle personnalité politique êtes-vous proche ?».

J'ai joué et répondu à l'une des dix questions posées que j'étais pour l'augmentation du nombre des policiers. Comme vous voyez, je suis en désaccord manifeste avec Sarkozy sur ce point aussi. Le plus rigolo, c'est qu'à l'issu du test je fus étiqueté proche d'Arnaud Montebourg. J'en ai été fort satisfait car c'est assez juste. Malins, les concepteurs du petit jeu !

S'il fallait démontrer d'un détail significatif le désordre dans lequel le pouvoir sarkozyste a précipité police et justice, je citerais la demande d'excuses adressée à la France par le ministre Belge de la Justice, Stefaan de Clerck. Un gamin belge de 13 ans avait disparu de chez lui le 23 juin dernier. Les autorités belges avaient donné son signalement aux voisins dans le cadre de Schengen… La France s'est aperçue le 5 juillet qu'elle détenait le gosse, arrêté pour vol de nourriture dans un supermarché le lendemain de sa disparition. 12 jours après le signalement !

S'il me fallait trouver un moyen de faire quelque chose de mes pieds sur le clavier, sans quitter l'insécurité, ce qui me semble un thème adapté, je glisserais brièvement sur l'histoire de la préfète otage d'un agité en gare de Bordeaux… Juste le temps d'enfourcher ma propre anecdote (je me demande si je ne l'ai pas déjà racontée… Tant pis !).

C'était il y a pas mal d'années, ma femme et moi venions de prendre à Montpellier un TGV pour Paris —dans un contexte de nervosité générale par crainte d'attentats.
Soudain, surgit dans la voiture un bonhomme très rouge, brandissant une carte barrée de je ne sais plus quelles couleurs… «Je suis de la police ferroviaire ! Un individu armé me poursuit, avertissez le contrôleur !»
Je me lève inquiet ainsi que d'autres personnes, pour apercevoir vaguement un type en chemise blanche qui s'agite dans la voiture voisine.
«Je tire le signal d'alarme, que je dis.
Non, surtout pas, prévenez le contrôleur !» qu'il répond, avant de s'enfermer dans le local des toilettes.

À travers la vitre de la porte de séparation dont je me rapprochai alors, un minimum d'attention permettait de constater que le type en chemise blanche était un jeune homme brandissant de la main droite un sabre de coupeur de canne à sucre, et tenant de la main gauche un bout de papier dont il semblait faire la lecture aux voyageurs…

Aller prévenir un contrôleur en passant devant le sabre de cet excité ? Heu… Je retournai m'asseoir en priant ma femme de s'installer côté fenêtre où il me semblait qu'elle serait davantage à l'abri, moi occupant le siège du couloir. L'ennui, c'est que ma femme avait suivi le même raisonnement et qu'elle voulut m'obliger à me glisser près de la fenêtre. Une petite scène de ménage s'ensuivit, à laquelle un voyageur voisin mit un terme en me disant : «allons, du sang froid, de toute façon il n'y a pas de danger.» Dépité, je cédai à mon épouse, et, une fois assis, je m'aperçus  que le voisin avait récupéré dans ses bagages une raquette de tennis posée en travers de ses genoux, dont il en étreignait fermement le manche. Pas de danger, vraiment ?

À un moment, on entendit vaguement le jeune homme crier à côté, et me levant à demi je le vis apparaître brièvement puis disparaître de mon champ de vision, de plus en plus agité. Et pendant ce temps là, notre policier ferroviaire était toujours aux toilettes…
Les années ont un peu brouillé les détails de la suite des événements, mais j'ai fini par tirer le signal d'alarme, pour la première fois de ma vie. J'ai arrêté un TGV en pleine nature, entre Montpellier et Nîmes, parfaitement.

Une longue attente suivit, durant laquelle nous vîmes le policier réapparaître. Je crois bien qu'il était soulagé tout en soupirant d'un air de reproche qu'il ne fallait pas faire ça… Nous vîmes aussi un bonhomme à la mine sévère prendre ses grandes valises sans un mot, ouvrir la porte et descendre sur la voie. Il partit à pied le long du ballast en direction de Montpellier, je n'ai jamais su s'il était arrivé à bon port.

Plus tard, une escouade de gendarmes fortement armés fit son apparition, nous étions alors descendus de notre voiture, et l'affaire se termina avec la neutralisation du jeune homme que vous vîmes tirer du train et traîner vers un fourgon sans ménagement. Ma femme protesta de loin contre la brutalité de l'arrestation, mais autant qu'il m'en souvienne personne ne l'entendit.

Que c'était-il passé ? L'homme de la sécurité ferroviaire, que j'ai appelé policier faute de connaître son titre exact, contrôlant les bagages des voyageurs au départ du train, avait confisqué le sabre du jeune homme. Furieux, celui-ci l'avait saisi par la cravate, l'étranglant. Ce que voyant, un brave voyageur Suisse s'était emparé du sabre qu'il lui avait rendu pour apaiser sa colère… Las ! Le policier n'avait dû son salut qu'à la fuite…

Tandis que le jeune déséquilibré haranguait les voyageurs de sa voiture terrifiés (une dame eut un malaise cardiaque), les contrôleurs qui se trouvaient du côté opposé du train avaient prévenu la gare de Nîmes où les gendarmes attendaient l'arrivée du TGV pour intervenir. En tirant le signal d'alarme, j'avais compliqué les choses, en somme ; sans compter une série de retards en cascade pour beaucoup de trains… On ne m'a jamais rien reproché, ouf !

lundi 4 juillet 2011

Vous avez dit DSK ?

Vouloir faire un billet politique aujourd'hui sans parler encore et toujours de DSK relèverait de l'exploit. Je n'essaierai même pas. Alors parlons de DSK… Il y a deux versants à son histoire : le premier et le second comme aurait pu dire J-P Raffarin. Le premier concerne l'éventuel retour du grand blessé dans les affaires du PS. Je suis comme une majorité de Français, cela ne m'emballe pas du tout. Déjà, si rien de fâcheux ne s'était produit à New-York, et dans l'hypothèse probable où il serait sorti vainqueur des primaires, je n'aurais voté pour lui qu'en traînant des pieds sur le chemin du piège à cons.

Dominique Strauss-Kahn, quels que soient ses mérites intellectuels, incarnait à la perfection la devise de tous les présidents de la Ve sans exception : le changement dans la continuité. Changement d'étiquette, continuité du pouvoir solitaire, de la perversion monarchique. Il y aurait eu le programme du PS, bien sûr, mais seulement ce qu'il en aurait retenu. Très peu pour moi, mon idéal raisonnable se réfugierait plutôt dans la candidature d'Arnaud Montebourg et de ce qu'elle porte d'espérance démocratique. D'autre part, on aura beau laver son honneur des soupçons odieux qui l'entachaient, DSK gardera désormais le handicap d'une image de dominant insatiable. De ceux qui se permettent trop de licence à l'abri de leur argent, de leur puissance. Qu'on le veuille ou non, le voici politiquement fragilisé jusqu'à ce que la cervelle d'oiseau de l'électeur français, miséricordieuse aux politiques, ait oublié.

Le second versant de l'histoire dévale sur le complot. Jusqu'à présent, la vue des intrigues envisageables manque un peu de netteté. Des gens se passent l'info de l'arrestation de DSK par la voie hiérarchique de la réception du Sofitel à la chambre de Sarkozy : rien d'extraordinaire. Ce qui aurait été extraordinaire, c'est que l'on me téléphone à moi de New-Yord pour m'avertir. Mais il ne faut pas s'impatienter, il doit y avoir moyen de faire mieux. 

On finira bien par retrouver l'hôtel secret de la DGSE en Guinée, où Nefissatou Diallo a suivi dès 2004 un entraînement intensif en prévision de sa mission. On dénouera un à un les fils de cette terrible machination depuis l'émigration aux USA de la terroriste, et son placement au Sofitel par les services.

À moins qu'il n'apparaissent finalement que c'était encore un coup de Ben Laden, programmé bien avant sa mort, afin de décapiter à la fois le Fonds Monétaire des Infidèles et ce chien de Sarkozy,  dans un coup de billard magistral : la réputation de DSK ruinée, Al-Qaida faisant en sorte que les mensonges sa bonne-suicide jette le soupçon sur l'Élysée… La thèse du complot est romanesque, riche d'infinies possibilités, sans compter qu'il est toujours possible que Nicolas Sarkozy soit réellement impliqué : cherche à qui profite le crime.

samedi 25 juin 2011

Ne pas confondre escherichia gauchi et escherichia droiti

Vous avez remarqué ? L'infection au colibacille se répand dans tous les médias. Le niveau de gravité n'atteint pas encore celui du virus H1N1 avant-hier, mais cela ne saurait tarder. À entendre ou à lire les journalistes, Escherichia coli (à la radio, les plus flemmards parlent d'écoli, comme une formule économique de coli-diarrhée postal), Escherichia coli serait la nouvelle ennemie tombée du ciel sur notre malheureuse humanité. 

La dernière attaque de la bête est survenue dans le fief de Noël Mamère, vous vous rendez compte ? Même les écolos ne sont pas épargnés par un genre d'intoxication dont M. Mamère en personne dit qu'il «est lié à des systèmes de production agricole et à des modes industrialisés de transformation agroalimentaire» !

Ce qui m'étonne le plus dans ces histoires de coliques fatales, c'est que l'on nous rappelle fort peu qu'Escherichia coli appartient au cheptel intime de chacun d'entre nous depuis la naissance. Certes, il y a Escherichia et Escherichia, comme le bon moutonnier sait distinguer la berrichonne de la mérinos, mais en gros et même en très gros (1011 à 1012 bestioles selon la faculté) nous déambulons constamment avec notre troupeau domestique. 

Lorsqu'on y songe, c'est fascinant… Tenez, la prochaine fois que vous verrez Nicolas Sarkozy s'exprimer à la télévision dans le cadre quotidien de sa pré-campagne électorale, représentez-vous les 1011 à 1012 colibacilles qui se font la courte échelle pour essayer de nous séduire. Rien que des Escherichia droiti. On se dit qu'il faudra penser à se laver les mains avant de voter, non ?

mercredi 22 juin 2011

L'UMP contre la démocratie

L'UMP a peur des primaires socialistes, l'UMP a peur de la démocratie. Que les tentatives de sabotage du parti de Sarkozy échouent, et vous imaginez l'allure qu'ils auront, ces godillots marchant au scrutin sous les ordres du président candidat auto-désigné ? Tout est bon aux Coppé, Guéant, et autres Juppé pour essayer d'empêcher les français sympathisants du PS de choisir librement leur champion. 

La peur de l'exemple : à ma gauche un homme ou une femme portant réellement les espérances des citoyens qui l'auront préféré(e) à plusieurs autres, à ma droite un bout d'autocrate dont personne n'aurait voulu dans sa propre famille politique, s'il n'avait le pouvoir de s'imposer.  D'un côté la naissance de nouvelles pratiques, proches des gens, de l'autre la continuité des mœurs claniques, la sclérose d'une autorité détestable. 

Alors l'UMP sort les arguments les plus bas : on va ficher les sympathisants, repérer les opposants en recoupant les listes d'émargement. C'est faux, le PS a pris des mesures strictes, des engagements clairs. Il fallait que ce soit dans notre vieille France, croupissoir de la démocratie confisquée, qu'un parti veuille empêcher les citoyens de faire de la politique autrement. Aux États Unis, les primaires sont la règle dans tous les partis depuis fort longtemps… Qui a jamais entendu les Républicains accuser les Démocrates de ficher les électeurs, ou l'inverse ?

Comme les accusations mensongères pourraient être insuffisantes à décourager du vote des Français lassés de souffrir de sarkozychia coli, le pouvoir multiplie les obstacles à l'organisation des primaires. Des préfets, des maires (comme Juppé, maire de Bordeaux) refusent de communiquer les listes électorales ou de prêter des salles publiques au PS…

Pour tout savoir sur l'organisation des primaires consultez les pages du site suivant :
Les primaires citoyennes, c'est vous qui décidez !
La carte des villes et régions qui bloquent…

mardi 21 juin 2011

Delanoë ne soutiendra pas Robespierre

Au petit matin, deux ou trois sujets de billets me sont venus à l'esprit, inspirés par les premières informations entendues à la radio, confirmées de demi-heure en demi-heure, jusqu'à ce que j'en ai marre. D'autant que le moment était venu de prendre un mini-bus pour aller récupérer à la ville ma voiture tombée en panne hier, une fois de plus. Encore une infime paille dans l'électronique qui paralyse tout : de la poussière sous le capot, une couleuvre dans l'échappement, une ampoule grillée quelque part… Ma prochaine voiture, si prochaine il y a, sera néo-rustique. Je veux des bougies, un carburateur, une manivelle, et la satisfaction d'avoir contribué à foutre au moins un concepteur d'électronique embarquée au chômage. Maudits soient-ils tous, d'ailleurs ! Et pendant que j'y suis, les fonctionnaires de certaines institutions publiques aussi, ces caricatures évadées des pages du Château sans emporter la moindre trace de l'humour de K. avec leur brosse à dents.

Ce matin, je me suis frotté à l'une d'elles qui m'a demandé de fournir un acte de naissance intégral d'une personne décédée que je n'ai jamais vu de ma vie et qui m'est étrangère. Comme je lui demandais conseil sur la manière dont je pourrais m'y prendre pour la satisfaire, elle m'a répondu, souveraine : «nul n'est sensé ignorer la loi» —aucun rapport avec mon problème. L'alpha et l'oméga des obscurs du pouvoir pour assommer les importuns. 

Pourtant, il était encore tôt, j'étais seul devant son comptoir de merde, elle aurait pu se fendre d'un tuyau quant à la meilleure façon de contourner honorablement la loi en pareil cas, précisément. Parce que le plus marrant, c'est que cette pintade ignore la loi, figurez-vous. Moi aussi, mais je me suis informé sur internet depuis : entre autres précisions, il me faudrait connaître les noms des parents de la personne en question pour avoir le droit d'obtenir un acte intégral. Autant dire que ce n'est pas pour tout de suite. (Vous avez relevé je suppose mes contradictions : maudits soient les électroniciens en début de billet, par ici internet dix lignes plus bas… M'en fiche, je maintiens !)

Et voilà comment mes idées de billet ont commencé à s'évaporer doucement ; passer la moitié de la journée dans les bouchons de la côte a fait le reste. Je crois bien qu'à un moment, j'ai entendu Saint Bertrand Delanoë expliquer pourquoi il soutiendrait Martine Aubry aux primaires seulement la semaine prochaine. Moi, je ne sais pas encore. B. Delanoë a aussi délayé dans la lavasse verbale le refus de baptiser une rue de Paris du nom de Robespierre, exprimé au Conseil municipal par Anne Hidalgo. S'il y a pourtant un révolutionnaire qui mériterait cet honneur de la capitale, c'est bien Robespierre ! Le résumer à la Terreur, dont il ne cautionnait pas les excès, est un peu court. Danton aussi corrompu que brillant politique a eu cet honneur de longue date : notre république doit être plus à l'aise dans la corruption qu'avec les valeurs de sa devise «Liberté, égalité, fraternité» incarnées par Robespierre.

P-S : Bon Anniversaire à Fucking disgrace, et pour la Fête de la musique, je vous invite à découvrir le blog de l'ami Orlando de Rudder, si vous ne le connaissez pas encore (il est dans ma blogroll). Chez lui, c'est souvent décoiffant, et j'aime bien le lire. Même si je ne suis pas toujours d'accord avec ce qu'il écrit, en particulier sur l'écologie.

samedi 11 juin 2011

Luc Ferry en travailleur acharné

La principale information du journal de France Inter, que j'ai écouté ce soir, tournait encore autour du nombril de Luc Ferry. Enfin, non, autour de sa langue et de son portefeuille, plutôt. Je laisse la première, faute de savoir comment l'accommoder. Le second, l'affaire de son double salaire et de son poste d'enseignant fantôme alimente déjà tous les commentaires. Qu'y ajouter ? 

Un détail peut-être, relevé au détours d'une dépêche de Reuter… Il y est précisé que Luc Ferry, selon les services du premier ministre, «perçoit 1800 euros bruts par mois pour présider le Cas, qui se réunit une dizaine de fois par an et a récemment rendu un rapport sur la jeunesse.»

Problème : sur le site du Conseil d'Analyse de la Société, il est annoncé comme dernière actualité que «Le Premier ministre, Monsieur François Fillon, confie une lettre de mission sur les jeunes à Luc Ferry, Président du Conseil d'analyse de la société. Un rapport sera rédigé et remis au Premier ministre en novembre 2011»

Soit le Conseil travaille d'arrache-pied sous la houlette du philosophe, et il a expédié le boulot avec cinq mois d'avance, soit on a fourni une mauvaise information à la journaliste de Reuter qui n'a pas vérifié ce détail.

Et puisque j'en suis à relever de menues anomalies à la loupe, j'ai aussi remarqué que le précédent rapport sur La Révolution du livre numérique, du mois d'avril, faisait double emploi avec un autre. En 2008 un rapport consacré au même sujet avait été en effet remis à Christine Albanel par Bruno Patino.  À la place de M. Patino, je lirai attentivement le nouveau texte : vous ne voyez pas que M. Ferry l'ait plagié pour gagner du temps ? Mais je plaisante, évidemment !


P-S : un rendez-vous à retenir, le lundi 13 juin, le capitaine de La Boiteuse, bien connu des blogueurs politiques sous le nom de Gwendal, parlera dans le poste de ses rêves de navigation aux alentours de 19h. Ce sera sur le Mouv', dans l'émission d'Éric Lange… Chez Zette, les billets sont souvent rigolos, comme celui de ce soir

vendredi 10 juin 2011

PSA, la main dans l'urne

Comme tout le monde, j'ai entendu beaucoup parler de cette note confidentielle de Peugeot divulguée par la CGT, qui envisage la fin de l'usine d'Aulnay-sous-Bois. Les accusations et les démentis pleuvent. C'est vrai ou c'est faux ? Allez savoir ! Du moins, la menace de fermeture est du domaine du possible. 

Des gens qui semblent informés en matière d'industrie automobile énoncent des choses troublantes. Ainsi M. Loubet (voir son interview sur le site L'usine Nouvelle), rapporte que «de tout temps, on a dit qu'il y avait une usine de trop» dans l'organisation de PSA. Il semble surtout que le fonctionnement des usines d'aujourd'hui en «plate-formes» accentue le risque de chômage pour leurs ouvriers dans le monde tel qu'il est devenu. Telle usine, comme celle d'Aulnay, produit un type unique de voiture. Quand le modèle et ses déclinaisons passent définitivement de mode et que la production s'arrête, vient le moment où il faudrait relancer la machine avec une nouvelle voiture. C'est là qu'il peut être décidé de fermer l'usine, pour un tas de raisons patronales que la raison commune ne connaît pas.

Il se pourrait que dans cette affaire, les parties soutiennent deux vérités : PSA en disant que rien n'est décidé, et la CGT en montrant document à l'appui que la chose a été bel et bien envisagée. Le but de la centrale syndicale pourrait être de forcer préventivement la main des décideurs de PSA, afin qu'ils s'engagent dès maintenant à produire un autre modèle sur le site dès la fin programmée de la C3.

Pour ma part, ce ne sont pas ces problèmes économiques et industriels trop complexes qui ont attiré mon attention. Je suis frappé par l'époque qui était retenue dans la note confidentielle de PSA pour annoncer la fermeture de l'usine d'Aulnay : «au deuxième semestre 2012» afin de tenir compte du « calendrier électoral français »…

En d'autres termes, les dirigeants de PSA votent à droite —on s'en serait douté certes, mais il est intéressant de les prendre en flagrant délit. Bien entendu, comme ces gens là ne sont pas stupides, ils auront soins d'arroser quelque peu aussi la gauche de leurs dons officiels afin que celle-ci soit tout de même leur obligée, si elle parvient au pouvoir.

Espérons que ce sera effectivement le cas, et qu'une fois aux commandes du pays, cette gauche se souviendra de mordre la main qui lui aura donné un susucre.
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P-S: Et pendant ce temps là, Mtislav délire sur la démographie, tandis que  Christophe égrène ses textes —j'en ai lu plusieurs en douce, mais j'ai du retard… Et vous ? Monsieur Poireau passe à table, ce qui n'étonnera personne, mais en mauvaise compagnie : c'est plus surprenant.

mardi 7 juin 2011

Pour une 51 ème proposition au rapport Ciotti

Le rapport sur la détention, d'Éric Ciotti, a fait pas mal de vagues aujourd'hui.  Nicolas Sarkozy, on s'en serait douté, accueille favorablement les 50 propositions du député UMP pour durcir l'exécution des peines de prison.

Première conséquence, si les préconisations du rapport sont suivies d'effet : la crise du logement va sévir dans le milieu carcéral. Qu'à cela ne tienne, M. Ciotti propose de construire des prisons, d'aménager des casernes désaffectées, voire d'utiliser des structures légères. Bref, je vous renvoie à la lecture de la presse pour approfondir l'information…

Quant à moi, je m'étonne qu'en cette période de crise aiguë du monde agricole, M. Ciotti n'ait pas songé à envoyer les détenus à la campagne. Nul doute que les éleveurs pourraient aménager des places dans leurs étables vidées d'animaux par la sêcheresse. Et il n'y a pas que les éleveurs : tous les cultivateurs sont à la peine. Cela ferait d'une pierre deux coups : allégement du fardeau immobilier et création d'un revenu de complément appréciable pour les paysans —cela sans augmentation du nombre de fonctionnaires.

Cette brillante idée n'est en fait qu'un souvenir de lecture qui m'est revenu en écoutant les nouvelles à la radio. Charles Morgan, écrivain britannique, avait imaginé une telle solution dans Le Voyage, roman des années 40. Du coup, rendant à César ce qui lui revient, je vous cite le passage qui m'a inspiré les lignes précédentes…

«[…] en 1826, le grand-père de Barbet, Guillaume, négociant à Roussignac en même temps que viticulteur, fut désireux d'acquérir l'ancienne prison de la ville, contiguë à ses biens en cet endroit ; il proposa — les criminels mêmes devant avoir un toit — d'enfermer ceux-ci temporairement chez lui, la cour nord de la maison Hazard où il installerait des cellules qu'il pourrait surveiller. Il aurait les prisonniers à sa charge et toucherait une redevance à cet effet. Cet arrangement était très avantageux pour un homme logé dans une habitation trop vaste et il s'efforça de le rendre permanent. Si bien que la défaite de la monarchie, l'avènement et la chute du second Empire, comme les nouvelles institutions de la troisième République, le laissèrent intact. Personne n'avait intérêt à y rien changer. Julien succéda à Guillaume, et lorsqu'à la mort de Julien ses deux fils se partagèrent l'héritage, Anton l'aîné et le plus riche, eut la maison de commerce Hazard et Vincent, ainsi que les intérêts de la famille à Roussignac, tandis que le domaine des Hazard, ses vignes, sa ferme et sa prison devenaient la propriété de Barbet, le puîné. Durant cette période le gouvernement central — tous les gouvernement centraux — délicieusement français, se montra satisfait de l'état de choses ; car le système fonctionnait bien. […] Lorsque la charge de la petite prison échut à Barbet, cela le contraria, car il ne se sentait nullement qualifié pour être un gardeur d'hommes. Il s'en acquitta cependant du mieux qu'il put et, faute de relâcher ses prisonniers, il s'en fit des amis. »

(Stock 1949, traduit par Germaine Delamain, avec une préface de Paul Valéry)

samedi 4 juin 2011

Contribution pour une énergie renouvelable

J'écoutais ce matin à la radio dans ma voiture, une émission à propos de l'énergie nucléaire —les conséquences de son abandon par l'Allemagne. Des grosses têtes d'économistes, capables de raisonner à 8 heures du matin sur l'atome, le démantèlement éventuel des centrales, le coût de l'énergie, tout ça…, c'est impressionnant. J'admire la performance, car si j'ai moi aussi une grosse tête entre 5 heures et 9 heures du matin environ, c'est une grosse tête d'un autre genre. Je peux boire mon café en silence, conduire à la rigueur, mais parler d'économie, non. 

Sauf peut-être économies d'énergie, c'est plus facile : pensez à débrancher le frigo avant de partir, il est inutile de le laisser fonctionner quand vous n'êtes pas là pour l'ouvrir. Déplacez-vous le plus possible dans le noir chaque fois que vous connaissez le chemin, n'allumez qu'une seule ampoule par pièce, de préférence de 25 watts, rechargez votre téléphone et vos diverses batteries chez le voisin. À la belle saison, privilégiez les repas de crudités : concombres, tomates, salades, steaks tartares, saumon fumé, caviar, ou alors allez au restaurant. Cela peut surprendre les esprits courts, cette suggestion du restaurant, mais qu'ils réfléchissent un instant : en cuisinant chez soi, on gaspille de l'énergie quand il est si facile d'aller manger en ville. Vous avez le choix de faire un geste pour la planète alors que le restaurateur, lui, ne l'a pas. Son métier exige d'allumer ses fourneaux et d'éclairer la salle chaque jour d'ouverture, l'électricité sera consommée de toute façon. C'est fou, ce que nous pourrions faire pour le bien de tous.

Tenez, ce matin je me disais que ces gens étaient irritants de nous servir encore et toujours l'impasse où seraient les énergies renouvelables pour justifier notre société atomique. Les énergies alternatives ne satisfont qu'une faible partie de notre consommation. À les croire, nous serions donc condamnés à la fuite en avant dans le nucléaire, puisque nous ne savons pas encore comment remplacer nos centrales. 

Ce serait pourtant très facile, il suffirait que chaque foyer français possède un vélo d'appartement par personne, équipé d'un alternateur (il paraît que le terme de dynamo pour désigner le bidule à électricité de nos vélos serait impropre). Un tel alternateur produit environ 3 watts. Donc, 65 millions de Français accomplissant leur devoir énergétique seraient susceptibles de fournir au réseau 195 000 000 de watts. Et encore ! il ne s'agit là que d'une évaluation fondée sur du matériel de base, avec des alternateurs fabriqués en Chine. Songez aux progrès qu'il doit être aisé de réaliser en matière de rendement : nos ingénieurs seraient bien capables de porter celui-ci à 6 watts en un rien de temps, soit 390 millions de watts produits. De quoi faire fonctionner 15 600 000 ampoules de 25 watts !

Ceci dit, n'allez pas croire que je me fiche de la gueule des écologistes. Je trouve leurs arguments souvent excellents, et comme eux, je suis en faveur d'un sortie progressive de la folie nucléaire. Mais quel gouvernement nous demandera notre avis ?

mardi 31 mai 2011

Anniversaire et argent

Il y a cent ans, le 31 mai 1911 une nouvelle maison d'édition publiait ses premiers ouvrages : Isabelle, d'André Gide, L'Otage, de Paul Claudel. Les éditions de la Nouvelle Revue française venaient d'être fondées par Gaston Gallimard, André Gide et Jean Schlumberger. On connaît la suite : la petite maison d'hier deviendra le groupe Gallimard d'aujourd'hui. Curieusement, je n'ai vu de rappel de cet anniversaire que sur un site de presse suisse, Le Temps.

Mon intention n'est pas de retracer sur ce blog politique la croissance de cette prestigieuse entreprise d'édition, mais de m'arrêter brièvement sur la personne de Gaston Gallimard. Il était né coiffé, en quelque sorte, dans une famille de riches bourgeois. Rien ne le prédestinait à donner naissance à l'une de ces dynasties du monde de la culture, comme il en existe quelques unes chez nous —les Casadesus, dans la musique et les arts de la scène, par exemple. Rien, sauf son éducation, son attirance pour les lettres, et la fréquentation du milieu littéraire de son époque. Son argent a fait le reste, et franchement, je ne trouve pas qu'il ait été mal employé ou que notre pays ait eu à s'en plaindre.

Sur le site du Point, Jacques Séguéla, fleuron d'un autre genre, ami des Sarkozy, dresse sa liste des signes extérieurs de la réussite. Il le fait dans le cadre d'un inventaire où se déverse tout le dépit qu'il a retiré du tapage suscité par sa fameuse maxime : «Enfin, tout le monde a une Rolex ! Si à cinquante ans, on n'a pas une Rolex, on a raté sa vie». Sa liste utilise bien entendu le registre de la dérision pour illustrer sa conception de la vulgarité. En 1970, Jacques Séguéla a co-fondé la célèbre agence de communication RSCG. Qui sait si en 2070 on ne célébrera pas M. Séguéla et la création de cette entreprise de pub, dans un monde où le goût de chiotte serait devenu dominant ?

Enfin, à propos d'argent, je ne voudrais pas terminer cette note sans recommander la lecture d'un remarquable billet  que j'ai lu ce matin sur Variae : DSK, Hamon et l'argent qui choque.

P-S: Nicolas nous rappelle quelques vérités sur la présidentielle de 2012 que l'on aurait tort de comparer par avance à la funeste élection de 2002. Il a raison, de même que de rappeler le chemin du site Unite2012 sur lequel figure la lettre ouverte d'un électeur en faveur de l'unité de la gauche : à lire d'urgence si ce n'est déjà fait !

jeudi 26 mai 2011

Une lettre ouverte pour l'unité

Je ne sais pas si vous êtes comme moi, sympathisants de l'opposition en général et du PS en particulier, mais si c'est le cas, vous devez commencer à vous faire du souci… Moi, en tout cas, je m'inquiète. La montée du FN, m'inquiète, même si les derniers sondage disent Mme Le Pen en perte de vitesse. On sait la confiance que l'on peut accorder aux sondages… Les capacités de rebond jusqu'au dernier moment de Sarkozy m'inquiètent… La division de l'opposition, les luttes de leadership au sein du PS, m'inquiètent. Comme vous sans doute, il y a au PS et ailleurs des têtes qui ne me reviennent pas, d'autres qui me plaisent, mais j'ai la conviction que si nous voulons en finir avec les années Sarkozy, il faut faire taire d'urgence les divisions. C'est pourquoi je me suis joint aux signataires de la lettre ci-dessous pour appeler à l'unité de la gauche. Je vous invite à lire cette lettre, à la signer vous même sur le site qui lui est dédié, et à la répandre le plus largement possible autour de vous. Merci !

 

Lettre ouverte d’un électeur à tous ceux qui font de la politique à gauche

Pour faire avancer l’unité à gauche, faites comme nous : copiez, collez et personnalisez cette lettre ouverte, puis envoyez la vite aux responsables politiques de gauche que vous connaissez. Et faites tourner !
Le Kremlin-Bicêtre, mai 2011
Chers camarades,
Comme disent les Chinois, il est des coups de massue qui rendent lucides : si la gauche veut remporter les élections présidentielles de 2012, elle devra aller unie au combat dès le premier tour.
Imaginer que tel ou tel candidat ou candidate évitera la dispersion des voix à gauche entre vos différents partis, provoquera le réflexe d’un vote « utile », est un pari dangereux, une illusion entretenue par des sondages dont on connaît la volatilité… et la fiabilité.
Enterrer Nicolas Sarkozy trop vite est tout aussi illusoire. C’est un redoutable adversaire en campagne électorale, chacun le sait. C’est un des rares domaines où sa compétence n’a pas encore été mise en doute.
Mais surtout, Marine Le Pen sera vraisemblablement au second tour, nul besoin de sondages pour le craindre.
L’élection présidentielle de 2012 se gagnera donc au premier tour. Autrement dit, celui des deux candidats, de gauche ou de droite, qui aura le plus rassemblé son camp avant le scrutin présidentiel aura de fortes chances de l’emporter, soit parce qu’il sera face à Marine Le Pen, scénario hélas le plus probable, soit parce qu’il aura obtenu un score élevé au premier tour et aura donc créé une dynamique suffisante pour gagner le second.
C’est le bête et implacable raisonnement arithmétique qu’impose notre scrutin majoritaire à deux tours. On peut regretter qu’il en soit ainsi, qu’il ne nous soit plus permis de faire un « choix de coeur » au premier tour. Mais c’est comme ça.
Cette réalité électorale doit conduire les politiques que vous êtes à agir en conséquence, c’est à dire à vous battre pour que ce soit bien le candidat de gauche qui rassemble le plus efficacement son camp dès le premier tour, et non celui de droite, Nicolas Sarkozy.
Inutile d’attendre le dernier moment pour bâcler un marchandage de circonstance, purement politicien, ou le programme et les idées passeront à la trappe. Inutile encore de compter sur un accord entre les deux tours, vite fait bien fait, entre les partis de gauche au cas où ce serait l’un des leurs qui accède au second tour. Dans le premier cas, face à Le Pen, pourquoi le candidat s’embarrasserait-il d’une négociation avec ses amis politiques alors qu’il est pratiquement certain d’être élu ? Dans le second cas, face à Sarkozy, redoutable candidat, le spectacle de chefs de partis de gauche se rabibochant opportunément après une campagne qui les aura durement opposés sera d’un effet déplorable et ne peut que favoriser le candidat de la droite.
Avez-vous le droit d’envisager cette défaite ? N’avez-vous pas, au nom de la confiance et des mandats que vous ont confié le peuple, des obligations, dont celle de gagner pour mettre un terme à la politique désastreuse menée par Nicolas Sarkozy ?
Chers camarades, il est temps d’atterrir. D’arrêter d’avancer en ordre dispersé, avec des candidatures tactiques, « providentielles » ou fantaisistes. Bref, il est temps de prendre la mesure de cette nouvelle donne électorale et d’en tirer les conséquences. Dès que possible, vos partis doivent travailler ensemble à une plateforme commune et à la désignation d’un candidat unique pour toute la gauche. Après tout, les primaires ont bien été imaginées pour cela, non ?
Rappelez-vous : n’avaient-elles pas vocation, à l’origine, à sortir des logiques partisanes en s’adressant à tous ceux qui « partagent les valeurs de la gauche », qu’ils soient roses, verts ou rouges ? Imaginez la dimension que prendraient ces primaires si elles mobilisaient tous les partis ! Elles donneraient un autre souffle à la campagne et un autre poids au candidat ainsi désigné. Et avouons-le, elles seraient sûrement prises beaucoup plus au sérieux qu’aujourd’hui.
Pour vous, responsables politiques, ce ne sera pas facile de dépasser les clivages et les rivalités d’appareils, on l’imagine. Certains d’entre vous ne souhaiteront peut-être pas monter dans le train de l’unité. Mais l’enjeu est à la hauteur de l’effort : pour que la gauche remporte ce scrutin présidentiel, l’unité et les concessions qu’elle implique, sont le prix à payer et, soyons plus positifs, le défi à relever.
D’ailleurs pensez-vous sérieusement qu’un programme qui rassemble tous les partis de gauche soit un défi aussi insurmontable ? Nous partageons tous un socle de valeurs communes : écologie, services publics, société solidaire, emploi pour tous, fiscalité redistributive, laïcité, régulation de la finance, éducation, innovation, recherche, et bien sûr, l’ambition d’une France forte, généreuse et influente sur la scène mondiale.
Chers camarades, quelle tâche plus stimulante qu’un programme unitaire pour ceux qui aiment la politique et veulent changer les choses ! Ce n’est pas une utopie, c’est une nécessité. Les électeurs le sentent et multiplient les appels dans la presse et sur le Net. Nous sommes à un an de l’échéance, vous avez encore le temps de vous y mettre. N’attendez pas.
Un programme, un candidat… la victoire en 2012 !
Captainhaka : Le grumeau, Custin d’Astrée : 365 mots, Cycee : bahbycc, Dominique Darcy : dominiquedarcy, Eric Citoyen : Mon Mulhouse, Gaël : De tout et de rien, Jean-Claude : Slovar – Les nouvelles, Jean Renaud Roy : @jr_roy, Juan : SarkoFrance, Jules Praxis : @jules_praxis, Le Coucou : Le coucou de Claviers, Melclalex : A Perdre la raison, MrsClooney : La femme de George (s) , Nicolas : Partageons mon avis, Nicolas Cadène : Débat socialiste, , Rimbus : Rimbus le Blog, Romain : Variae, Ronald : Intox2007, Jacques Rosselin : @rosselin, Seb Musset : Les jours et l’ennui de… , Stef : Une autre vie,  Sylvie Stefani : Trublyonne, Vogelsong : Piratages, Yann Savidan Carnet de notes de…, Zeyesnidzeno : La France a peur


Vous pouvez également signer cette lettre sur le site Unite2012

mercredi 25 mai 2011

Lagarde a peur [de la fin du monde], mais ne se rend pas.*

Samedi dernier, ce devait être la fin du monde. Romain de Lyonnitude(s) avait demandé pour l'occasion à une flopée de blogueurs, dont j'étais, ce que je ferais s'il me restait 12 heures avant la fin du monde… Je n'ai pas très bien compris comment lui-même occuperait son temps, la lecture de la Bible, ou une intense méditation sur la manière dont il occuperait ses dernières heures lors de la prochaine fin du monde, en décembre 2012 ?

Je viens de me souvenir de sa question, parce que j'ai du mal à nourrir l'idée de titre qui m'est venue : Lagarde a peur, mais ne se rend pas —ceci dans le cadre du concours de titres débiles qui s'est déchaîné depuis quelques jours dans les blogs. On aura reconnu un détournement de la fameuse réplique de Cambronne à la barre de la CIJ de Waterloo, lorsque accusé par le procureur Anglais d'avoir favorisé l'enrichissement d'un copain de l'empereur Nicolas 1er, il fut sommé d'avouer. Au passage, on notera l'absurdité de cette parole historique qui n'a aucun sens : il aurait dû s'exclamer «Cambronne a peur, mais etc. », car enfin il ne se nommait pas Lagarde ! Il s'agit en fait de l'un des premiers effets connus du politiquement correct, toutes les personnes présentes à l'audience l'ayant bel et bien entendu crier : «Lagarde vous emmerde !» Cette apparence incohérence s'éclaircit si l'on veut bien se souvenir que  Cambronne répondait à l'affectueux sobriquet de Lagarde auprès du personnel de son ministère. Il en était très fier.

Or donc, faute d'avoir eu le temps de me documenter sur la question dans la presse en ligne, j'ai laissé choir Lagarde. Plus grave, alors que N. Sarkozy est donné largement devancé au premier tour de la présidentielle par François Hollande comme par Martine Aubry, je me suis trouvé dans l'incapacité de récupérer un titre auquel je tenais  pour habiller les résultat du sondage !

Voilà pourquoi, j'ai finalement préféré vous dire que si la fin du monde nous était promise dans douze heures, je serais le plus heureux des hommes. J'ouvrirais une bonne bouteille (en plus, avec la chaleur, elle va s'abîmer), je prendrais un bon bouquin et j'irais attendre la délivrance au salon. Je n'aurais même pas la funeste tentation d'allumer la télé pour voir ça en direct : la mienne ne marche plus depuis hier, où nous sommes «passés à la TNT». Impossible de comprendre les subtils rapports entre le mode d'emploi chinoisé du décodeur et la notice danoise du téléviseur… Alors, ce serait un chouette programme, la fin du monde!

P-S : Le négus est À la traîne, comme moi en lecture chez Christophe … Un conseil de visite chez Orlando… Et un petit coup de pub pour mon blog annexe

samedi 21 mai 2011

Présomption de sincérité

Ce matin, je suis allé au marché du village voisin. Il n'est pas très grand, mais coloré et agréablement animé, dans la tradition des marchés provençaux. En circulant entre les étals me parvenaient des bribes d'une même conversation qui semblait se dérouler simultanément dans tous les coins de la place, comme par miracle. Je n'ai pas tout entendu, les gens parlaient à mi-voix, mais il était question de cul, de fric, d'américains qui ne rigolent pas. Je parierais que les Danois, nombreux dans nos parages, causaient aussi entre eux de l'affaire. Sûr qu'il s'est passé quelque chose dans la tête des gens.

Ce matin encore, mais beaucoup plus tôt, j'ai regardé sur Agoravox la vidéo d'une interview de Tristane Banon, qui date d'octobre 2008. Elle y parle longuement des épreuves qu'elle a traversées après avoir accusé DSK de viol en 2007. On l'a soupçonnée notamment de chercher à se faire de la publicité pour ses livres, soupçon relancé par certains ces derniers jours. Si je n'ai aucun avis sur l'actuelle affaire DSK, il n'en va pas de même pour l'histoire de cette jeune femme. Dans son cas, c'est une présomption de sincérité qui s'impose à moi. Présomption seulement, puisqu'il lui serait difficile de fournir une preuve de ses assertions, si loin des faits. En dehors de la franchise que je lui prête, la simple exposition des manœuvres déployées pour imposer à la presse le silence sur cette affaire, dont Agoravox témoigne avec humilité ( le site ayant lui-même à l'époque appliqué la censure aux propos de la jeune femme), démontre que quelque chose de grave était bien survenu entre elle et le leader politique. Le fait que ce dernier ne l'ait pas poursuivie en diffamation me semble un argument supplémentaire en ce sens.
Et puisque je pense ainsi, je n'ai pas de raison de le taire.

jeudi 19 mai 2011

Un complot pour la route ?


Le complot, c'est comme un train fantôme qui tourne en rond une fois lancé et ne s'arrêtera jamais. Dans les siècles à venir, il y aura encore des gens pour expliquer que les attentats du 11 septembre 2001 ne sont pas l'œuvre d'Abd El-Kader, mais une machination de Georges Washington.

Cette semaine, voilà le complot contre DSK sur les rails… On ne va pas tarder à s'écharper virtuellement dans les blogs à ce sujet. Déjà des avis divergent, par exemple entre Yann qu'un complot laisse sceptique et Hermes qui semble presque y croire, sans parler de Nicolas qui accuse carrément les multinationales de la lessive.

Personnellement, je ne sais que penser sur la question. À priori, je ne crois pas au complot : depuis que les langues se sont déliées dans le monde politique et les médias, un portrait de DSK se dessine qui rend l'agression plausible. Pourtant, à l'heure où j'écris ces lignes, on ne sait toujours rien des faits tels que les rapportent les deux parties concernées. Il est significatif d'en être réduit à poser le problème en terme de foi : j'y crois, je n'y crois pas…

Dimanche, Mme Boutin semblait croire à un piège, mais de sa part c'est moins étonnant qu'il n'y paraît. Au bout de cinq jours, on trouve encore d'éminents strauss-kahniens comme Cambadélis pour espérer dans une conspiration machiavélique. Leur cas est, il est vrai, particulier : la piété s'impose à eux autant par fidélité que par tactique politique.

Plus troublante en revanche apparaît la position de Chevènement qui n'exclut «aucune hypothèse», évoquant même l'affaire Dreyfus. En fait, c'est surtout la présomption d'innocence que Chevènement tient à défendre. Il apporte néanmoins du même coup sa caution aux tenants du complot qui ne se priveront pas de le citer, oubliant qu'il ne réfute pas non plus l'éventualité d'une explication «pathologique».

À la réflexion, je me demande s'il ne serait pas raisonnable de garder le complot au chaud. Il faut s'attendre en effet à ce que la droite cherche à utiliser cette affaire au cours de la campagne électorale pour salir le candidat du PS. On pourra leur objecter qu'il faut chercher à qui le crime profite.

source illustration via Le Matin.ch : images de synthèse taïwanaises sur l'affaire

mercredi 18 mai 2011

Au bal des faux culs

L'affaire de mœurs qui ébranle le monde politique français et abasourdit l'opinion publique est consternante sur tous les plans. Qu'une personnalité comme DSK, porteuse d'autant d'espoirs pour autant de gens, soit jetée à bas de son piédestal d'aussi vilaine manière est un choc. C'est démoralisant pour tous ceux qui l'attendaient en sauveur de la gauche —avec sympathie ou simplement par défaut. Il n'y a rien à dire sur l'aspect judiciaire : l'homme de la rue ne peut décemment se prononcer sur la culpabilité ou l'innocence de DSK quand les défenseurs officiels de ce dernier eux-mêmes ignorent le contenu du dossier.

Il y a en revanche matière à réflexion sur le fait qu'une écrasante majorité de Français ont pris en pleine figure la nouvelle de son arrestation sans avoir le moins du monde conscience des fragilités de cette vedette politique. Pour le dire crûment : se demander s'il n'y a pas eu tromperie sur la marchandise par manque d'information est une question légitime.

Il y a aussi matière à s'interroger sur le bal des faux-culs auquel on assiste avec l'espèce d'omerta que prétendent imposer la caste politique et ses obligés sous l'appellation de présomption d'innocence.

Je ne suis pas insensible au fait qu'un homme pour lequel j'aurais certainement voté se retrouve en proie à l'opprobre du monde entier. Face aux images, j'éprouve de la pitié pour lui. Si j'étais de ses amis, innocent ou coupable, je m'efforcerais de le défendre. Mais je ne le connais pas, je ne suis que l'un de ceux qui pouvaient lui faire confiance pour battre Sarkozy à la présidentielle.

Alors, je suis écœuré des invitations au silence lancées par le pouvoir, parce que cela pourra toujours servir quand reviendront au premier plan des affaires brûlantes ; lancées par mon propre camp que j'aurais souhaité moins hypocrite ; lancées par la confrérie des puissants et de leur cour qui se serrent les coudes.

Je veux rester libre. Libre de ricaner demain comme je l'ai fait au cours des mois passés, sur l'affaire Sarkozy-Woerth-Bettencourt. Je veux pouvoir m'interroger à propos l'attentat de Karachy, des rétro-commissions, ou d'autres scandales d'état, sans me sentir tenu à une auto-censure péteuse par honnêteté intellectuelle. L'affaire DSK est également dramatique parce qu'elle piège notre société dans ses contradictions.

lundi 16 mai 2011

Et maintenant ?

Les citoyens ordinaires n'ont jamais eu à définir les règles de la vie politique. Leurs élus s'en chargent, généralement inspirés par la loi qui leur importe le plus, celle de la jungle. C'est elle qui scelle le sort politique de DSK, et non le jugement incertain à terme des citoyens français sur l'affaire.

Il ne sert à rien de se gargariser avec la présomption d'innocence : imaginez à quelle sauce aurait été accommodé celle-ci dans le cas où Nicolas Sarkozy aurait été à la place de Dominique Strauss-Kahn. Le moment venu, la droite ne manquera pas de tirer parti de l'énorme scandale, d'ailleurs elle le fait déjà.

Innocent comme je le souhaiterais, ou coupable tel que le met en scène l'enquête implacable de la police new-yorkaise, DSK n'est plus crédible pour emporter une majorité de suffrages à la présidentielle. Même s'il était blanchi demain par la divulgation d'un complot, il resterait gravement fragilisé par l'étalage d'une personnalité pour le moins complexe auquel on assiste.

Il devient important que débute un processus de primaires où l'hypothèque DSK serait levée définitivement. Qu'on le reconnaisse ou non (et c'est plutôt non, bien sûr), cet homme tenait de facto le rôle de champion de l'opposition, sa chute l'ébranle toute entière. Il devient tout aussi important que l'opposition dans son ensemble se donne les moyens d'atteindre le but désiré par tous ceux qui se reconnaissent en elle : en finir avec le sarkozysme.

jeudi 21 avril 2011

N'importe quoi

Vous avez vu ? Les ministres rendent publics leurs intérêts «dont la valeur […] est susceptible d'être directement influencée par des décisions du gouvernement» (merci Le Monde). Sur le portail du gouvernement, la page de chaque ministre comprend désormais un lien qui permet de télécharger sa déclaration. N'allez donc pas imaginer que cela reflète l'état exact de leur patrimoine, beaucoup de choses resteront privées. La gestation de cet avorton a duré des mois depuis son annonce par Sarkozy, dégoulinant de vertu au lendemain du scandale Bettencourt dans lequel son nom était cité avec insistance. Une heure de travail du conseiller en charge de la taille des crayons aurait certainement suffit à dresser ces inventaires partiels et à les mettre en ligne. On imagine que la mise au point de la formule à retenir pour filtrer ce qui peut être porté à la connaissance du bon peuple a été délicate. Il n'est pas précisé s'il est possible de trouver l'équivalent pour le président sur le site de l'Élysée.

Vous avez vu ? Nos voisins Anglais vont encore épater le monde avec un mariage princier. Ils en ont de la chance ! Ce n'est pas chez nous que cela pourrait arriver. Ils ont les moyens de faire ça avec classe : la famille royale est sponsorisée par le peuple britannique. Ils ne sont pas obligés d'orner les carrosses de pubs douteuses, d'affubler la reine d'une casquette British Petroleum, le prince William d'un costard avec London Calling brodé au dos de la veste. Parce que ça coûte, un vrai mariage princier. Vous imaginez ce que cela aurait donné chez nous, si le président avait voulu offrir le spectacle de grandes noces nationales, lorsque son fils chéri s'est marié ? Il pouvait à la rigueur demander à la nation de prêter la garde républicaine pour la descente des Champs Élysées en décapotable, mais nous sommes en république, faut pas trop pousser. Le reste, toute la pompe et les chatoiements nécessaires pour donner aux festivités un éclat mondial, serait forcément venu des sponsors. Frédéric Mitterrand, qui n'était pas encore ministre de la Culture, aurait commenté l'événement dans le direct en mondovision offert par Bouygues : «La mariée porte une robe sublime, cadeau de Bolloré Logistics comme vous pourrez le vérifier dès qu'elle se tournera de l'autre côté pour saluer la foule…, ah non ! la robe est offerte par l'Oréal …» On se serait cru au mariage d'Yves Mourousi dans les années 80, en pire. Et comme en France nous avons mauvais esprit, surtout à gauche, nous aurions râlé, aveugles aux beautés des cérémonies, jaloux de ne pouvoir faire la même chose pour marier nos enfants. Heureusement, nous sommes dans la fiction, tandis que nous n'aurons pas un rond à dépenser pour assister au spectacle d'une famille royale qu'on sort de sa cage.

P-S : Stimulé par un billet de Dorham, Nicolas s'interroge encore sur le blogage, moi aussi.

mercredi 20 avril 2011

Conseil de lecture

Elle s'appelle Lucile, elle a 15 ans, elle est diabétique. Elle a écrit à Libération qui publie son mail de révolte contre la réforme du gouvernement envisageant de réduire les remboursements du traitement des affections de longue durée. Allez lire son témoignage, et faites ce que vous pouvez pour elle et les milliers de malades concernés.

Faites du foin, gueulez sur vos blogs, et pour le moins, n'hésitez plus à vomir Sarkozy et la bande de déprédateurs qui appliquent sa politique. Le simple fait qu'il termine tranquillement son mandat après avoir ravagé notre protection sociale, imposé de fait une médecine à deux vitesses, est un scandale. Nous l'avons laissé se repaître de la république avec sa tribu de privilégiés, oubliant combien il avait fallu de luttes sanglantes, et finalement la renaissance du pays à genoux au lendemain de la guerre pour que naisse une sécurité sociale pour tous. Nous sommes tombés bien bas pour n'avoir pas su défendre notre bien avec davantage de détermination.

Le cas de Lucile est représentatif de tous les gens gravement malades qui ont de plus en plus de difficulté à se soigner. Une personne atteinte par une maladie de longue durée doit non seulement recevoir des soins strictement en rapport avec son affection, mais d'autres aussi qui découlent de celle-ci. En outre, fragilisée, cette personne est beaucoup plus exposée que le reste de la population aux problèmes de santé ordinaires : les exclure de la prise en charge comme cela a déjà été fait est une ignominie.

Puisque je parle santé, restons encore un instant dans le domaine de l'insécurité sociale sous le talon de Sarkozy. Savez-vous à combien vous reviendrait une douzaine de jours passés à l'hôpital, en forfaits journaliers et autres franchises ? 1500 euros. Pour diminuer cette somme prenez une mutuelle ; si vous n'en avez pas souscrivez une assurance et si vous ne pouvez pas, eh bien, crevez !

P-S : M. Poireau nous a concocté un billet cochonYann est sous surveillance de ses lectrices… Il y a déjà longtemps que je cache mon paquet de Gauloise dans un étui confectionné à la maison : si ce n'est pas votre cas, le patron se trouve chez Gaël

mardi 19 avril 2011

De tout un peu

L'air du moment est au blogage, à ses fins pour le blogueur je veux dire. La question qui agitait les esprits ces jours derniers était celle de la rémunération des contenus repris par de grands sites. Cela me semble toujours bizarre que l'on parle de contenu dès qu'il s'agit de blogs, plutôt que de notes ou de billets, mais il est vrai que nos carnets de bord font penser aux petits bazars de province d'autrefois. On y trouvait un peu de tout, et d'ailleurs ils étaient quelquefois à l'enseigne «De tout un peu». Des vidéos, de la musique, des billets, des photos, de la pub, des recettes (chez moi, on trouve aussi des rébus)…, ouvrir un blog au hasard équivaut à soulever un couvercle de malle pour voir ce qu'il y a dedans.

Où voulais-je en venir, déjà ? Ah oui ! à vous encourager à soutenir Rimbus qui entend valoriser ses articles à coups de souris, clic, clic ! J'ai de la sympathie pour Rimbus, alors je viens de cliquer quoique rechignant à faire une fleur à son sponsor. Pourquoi cette répugnance ? L'agence de pub sur internet dont il est question m'avait proposé le même type de collaboration et je n'ai aucune raison de cracher sur quelques euros glanés par-ci par-là. Seulement, il me fallait prendre un statut d'auto-entrepreneur alors que moi, je voulais être payé en TEE (Titre Emploi Entreprise). Dans le premier cas pas de charges sociales pour «l'employeur», dans le second, si.


Sur un tout autre sujet, j'avais pensé hier à cybercarneter aujourd'hui sur l'énergie nucléaire. Tard le soir, j'étais tombé sur Complément d'enquête à la télévision… Je ne la regarde jamais, en principe, mais il se trouve que des amis soucieux de me distraire m'ont donné un superbe poste sur pied (à tube cathodique, mais mille fois supérieur au vieux machin dont je disposais auparavant. Quand on l'a posé sur le meuble adéquat, l'écran frôlait le plafond, on aurait dit un 4x4 garé dans le salon. Du coup, il a fallu réaménager ce coin de pièce). L'écran pivote sans bouger du fauteuil, il sait faire plein de trucs : bref, j'étais un peu curieux de l'essayer.

Le premier bouton de la télécommande m'a plongé dans des affres atomiques post-Fukushima… J'y suis resté, fasciné par ces fûts de déchets —radioactifs pour des dizaines de milliers d'années—, qu'il est question d'enterrer chez nous. Cela se fera au cœur d'une roche argileuse, dont on nous assure qu'elle ne bougera pas d'un poil d'ici un million d'années. Les Allemands avaient déjà fait la même chose, mais dans une profonde couche de sel, pareillement inébranlable pour une éternité d'homme. Pas de chance : la couche bouge de plusieurs centimètres par an, il faut récupérer les fûts à grands frais.

Si vous avez des enfants et des petits-enfants, demandez-vous ce qu'il se passera lorsque les petits-enfants de leurs petits-enfants auront complètement oublié qu'il a existé une industrie nucléaire en France à une époque reculée ? Vous me direz qu'ils auront autre chose à penser, avec les volcans d'Auvergne qui se seront peut-être réveillés… L'enquête était sinistre, Nathalie Kosciusko-Morizet un moment interviewée, était d'une sérénité olympienne, et mon acuité visuelle laissant à désirer, je me suis endormi sur place bien avant la fin.

jeudi 14 avril 2011

Les plus vieux clients du monde

L'ami Romain Blachier m'a posé, ainsi qu'à Nicolas et Yann, une question inattendue. Enfin, inattendue pour moi qui avais jusqu'ici zappé ce sujet pourtant d'actualité —les autres me paraissent plus qualifiés pour donner un avis.

«Faut-il pénaliser les clients et la prostitution en général ?» telle est à peu près la question de Romain. Comme lui et Nicolas, je trouve l'idée répressive de la mission parlementaire d'information sur la prostitution mal venue. Cela n'aboutira qu'à renforcer la clandestinité de ce commerce et aggravera un peu plus la misère sexuelle qui l'alimente en partie. On voit bien que les honorables missionnés n'ont pas étudié le problème sur le terrain…

Et moi, me direz-vous ? Zut, je me suis pris au piège du fil de la plume ! Moi, madame, monsieur, j'ai été en fin de compte d'une fidélité d'airain, je suis presque ignorant en la matière. Presque, notez… En fait, j'ai eu l'occasion d'observer de près la prostitution, il y a longtemps. Il me semble d'ailleurs avoir déjà évoqué ceci sur le blog, mais tant pis si je me répète. À la fin des années 60, entre autre petit boulots, j'ai été veilleur de nuit à Paris dans un respectable hôtel pour voyageurs de commerce.

À cette époque, comme cela arrive régulièrement, le pouvoir piqua sa petite crise de tartuferie qui aboutit à chasser les filles de joie de leurs hôtels de passe, les repoussant vers d'autres quartiers. C'est ainsi que l'une d'elle débarqua une nuit dans mon hôtel avec son miché, mais tout d'abord je les pris pour un couple adultère quelconque (ils étaient sans bagages) et leur louai une chambre. Il y eut un incident, car la dame insista lourdement pour que son compagnon me laisse un pourboire quand j'avais pour principe de les refuser. Je crois qu'elle m'eut à l'usure et qu'ils balancèrent un Pasteur de cinq francs par dessus mon comptoir avant de monter à l'étage.

Ils ressortirent prendre l'air ou souper un petit quart d'heure plus tard… C'est au retour de la dame avec un nouveau bonhomme que la lumière se fit dans ma tête, et j'eus comme un creux, là, en pensant aux explications à fournir le lendemain aux patrons. D'autant plus creusé, le creux, que la dame se mit en devoir de faire raquer son miché pour la chambre. «Voyons, vous avez déjà loué cette chambre : elle est à vous !» lui dis-je niaisement.

Elle me fit un dessin, le type à côté d'elle se marrait, prêt à profiter de l'aubaine, mais le portefeuille toujours à la main parce qu'il ne croyait pas réellement qu'on puisse être aussi con. Il paya, ils passèrent, et la dame repassa une bonne dizaine de fois avant le petit matin. La dernière fois, elle me conseilla d'être enfin raisonnable et d'empocher l'argent sans me prendre la tête (l'expression n'avait pas cours à l'époque, mais l'idée est là).

Quand je fis mes comptes, avant l'arrivée des patrons, je trouvais une jolie somme, laquelle multipliée par le nombre de nuits où la dame serait susceptible de revenir, faisait… Seigneur ! en un mois plus que je ne gagnerais en un an ! J'ai donné cet argent tombé du cul en sueur de la dame plutôt que du ciel, aux patrons, leur racontant en détails mon aventure. J'attendais de fermes consignes, une arme réglementaire pour me tirer d'embarras la prochaine fois. Le croiriez-vous ? Ils me dirent de veiller à ce que cela ne se reproduise pas trop souvent, et voilà tout.

Ma femme et moi avons aussi voisiné, dans un immeuble au cœur de l'ancien quartier des halles, avec une charmante kikinésithérapeute en studio, mais c'est une autre histoire qui rallongerait inutilement ce billet. D'autant plus que cela n'a pas grand chose à voir avec la question de Romain, à laquelle j'ai répondu dès le départ : je suis contre la pénalisation.
Mais qu'en penseront Gildan, Isabelle, Homer, et Olympe (une féministe, tiens) ?