Dans la blogosphère, on a suffisamment reproché à la presse l'ambiguïté de ses relations avec le pouvoir, sa complaisance parfois manifeste à l'égard de celui-ci, pour ne pas la saluer lorsqu'elle mérite l'estime. C'est le cas de Mediapart dont le parcours, depuis sa création en 2007, témoigne d'une parfaite indépendance. Sans publicité, tirant ses ressources des abonnements de ses lecteurs, il se rapproche tranquillement du seuil de rentabilité, environ 40 000 abonnés, que son directeur pense atteindre en 2012 (entretien d'Edwy Plenel dans le journal suisse Le Temps). Neuf euros par mois pour un journal d'information libre, c'est un prix plus qu'honnête —surtout si l'on compare avec les tarifs de la presse-papier, soumis il est vrai à d'autres contraintes…
Tiens, cela ressemble à un petit coup de pub ? C'est bien mon intention, en effet, depuis que je me suis demandé comment manifester ma solidarité avec ces journalistes en butte aux représailles verbales du pouvoir. Nous avons tous reçu plus ou moins l'écho des propos outranciers de la garde rapprochée de Nicolas Sarkozy —les plus récents lâchés par la bouche de Nadine Morano. Évoquant «des sites internet qui utilisent des méthodes fascistes», la secrétaire d'Etat relayait ainsi l'accusation de Xavier Bertrand, qui vaut à ce dernier d'être poursuivi en diffamation par Mediapart.
Il s'agit évidemment d'une contre-offensive d'intimidation de la presse dans son ensemble, que Nicolas Sarkozy souhaite museler au plus vite. On sait maintenant depuis longtemps avec quelle hostilité le président des Grandes Fortunes considère le monde d'internet et sa liberté de parole. Les hommes du président ne manquent jamais la moindre occasion d'installer dans les esprits la confusion entre critique politique et perversion, entre humeurs pamphlétaires et escroqueries diverses. Et comme la presse en mutation traverse une crise particulièrement sévère, qui incite ses patrons et ses journalistes à voir dans internet une concurrence sans foi ni loi, on comprend bien que ces accusations du pouvoir ne sont pas gratuites.
En quelque sorte, Mme Morano, M. Bertrand, et leurs comparses, appliquent une tactique qui sent l'affolement, mais a certainement été définie par l'Élysée. Couper Mediapart du monde de la presse classique et le discréditer aux yeux de l'opinion publique, en le ravalant au rang de «site internet qui utilise des méthodes fascistes à partir d'écoutes qui sont totalement illégales».
Il n'empêche que c'est l'honneur de ces journalistes d'avoir révélé aux Français les liens douteux qu'entretiennent leurs gouvernants avec le monde de l'argent. Il est probable qu'il sera impossible d'apporter la preuve que des enveloppes d'argent sont passées entre les mains de M. Woerth, et de M. Sarkozy. Il restera que des situations équivoques ont bien existé, indignes de personnes qui s'apprêtaient à occuper les plus hautes fonctions de la République.
Pris la main dans le sac, le pouvoir et ses pitoyables soutiens, tels Mme Veil et M. Rocard, voudraient nous faire croire qu'il serait antidémocratique de risquer d'attiser la colère du peuple. Détrompons-les: la démocratie passe précisément par le fait de ne rien dissimuler au peuple. Et pour cela, on n'a pas encore inventé mieux qu'une presse indépendante et incisive. C'est le travail de Mediapart.
P-S: bon anniversaire à Lyonnitude(s) qui fête ses trois ans!
Tiens, cela ressemble à un petit coup de pub ? C'est bien mon intention, en effet, depuis que je me suis demandé comment manifester ma solidarité avec ces journalistes en butte aux représailles verbales du pouvoir. Nous avons tous reçu plus ou moins l'écho des propos outranciers de la garde rapprochée de Nicolas Sarkozy —les plus récents lâchés par la bouche de Nadine Morano. Évoquant «des sites internet qui utilisent des méthodes fascistes», la secrétaire d'Etat relayait ainsi l'accusation de Xavier Bertrand, qui vaut à ce dernier d'être poursuivi en diffamation par Mediapart.
Il s'agit évidemment d'une contre-offensive d'intimidation de la presse dans son ensemble, que Nicolas Sarkozy souhaite museler au plus vite. On sait maintenant depuis longtemps avec quelle hostilité le président des Grandes Fortunes considère le monde d'internet et sa liberté de parole. Les hommes du président ne manquent jamais la moindre occasion d'installer dans les esprits la confusion entre critique politique et perversion, entre humeurs pamphlétaires et escroqueries diverses. Et comme la presse en mutation traverse une crise particulièrement sévère, qui incite ses patrons et ses journalistes à voir dans internet une concurrence sans foi ni loi, on comprend bien que ces accusations du pouvoir ne sont pas gratuites.
En quelque sorte, Mme Morano, M. Bertrand, et leurs comparses, appliquent une tactique qui sent l'affolement, mais a certainement été définie par l'Élysée. Couper Mediapart du monde de la presse classique et le discréditer aux yeux de l'opinion publique, en le ravalant au rang de «site internet qui utilise des méthodes fascistes à partir d'écoutes qui sont totalement illégales».
Il n'empêche que c'est l'honneur de ces journalistes d'avoir révélé aux Français les liens douteux qu'entretiennent leurs gouvernants avec le monde de l'argent. Il est probable qu'il sera impossible d'apporter la preuve que des enveloppes d'argent sont passées entre les mains de M. Woerth, et de M. Sarkozy. Il restera que des situations équivoques ont bien existé, indignes de personnes qui s'apprêtaient à occuper les plus hautes fonctions de la République.
Pris la main dans le sac, le pouvoir et ses pitoyables soutiens, tels Mme Veil et M. Rocard, voudraient nous faire croire qu'il serait antidémocratique de risquer d'attiser la colère du peuple. Détrompons-les: la démocratie passe précisément par le fait de ne rien dissimuler au peuple. Et pour cela, on n'a pas encore inventé mieux qu'une presse indépendante et incisive. C'est le travail de Mediapart.
P-S: bon anniversaire à Lyonnitude(s) qui fête ses trois ans!
13 commentaires:
Sur le fond, je suis assez d'accord.
Mais une question bête. Par "média indépendant", tu ne dis pas uniquement "média "idéologiquement de gauche"" et donc forcément "contre le pouvoir" ?
Je demande. Car j'ai l'impression de ne voir que "deux médias". Les médias "inféodés au pouvoir sarkozyste", et ceux "fonciérement contre le pouvoir sarkozyste". C'est idiot, mais je ne trouve ni l'in, ni l'autre, "indépendant".
Simple réflexion, qui n'enlève rien à ton (bon) billet. Mais j'ai l'impression de lire "qu'indépendant" signifie "de gauche". Et pour moi ça non plus, c'est pas indépendant...
Bonne soirée à toi
Bonsoir,
Merci pour le lien ! (et celui d'hier !)
La question de FalconHill est bonne...Les médias indépendants de droite le sont peut-être plus, quand la droite est dans l'opposition, non ?
En tout cas, les médias indépendants de gauche ne se gênent pas pour taper aussi sur le PS...Et c'est quand même un signe d'indépendance.
Par contre, je lis un peu le Figaro, depuis quelques mois et je dois dire que je trouve souvent le soutien au gouvernement outrancier et caricatural...
Pour l'indépendance à droite, on peut peut-être regarder du côté libéral ou de l'extrême droite, non ?
En tout cas, je soutiens aussi Médiapart !
la presse étrangère est de gauche aussi, ils font rien qu'à critiquer ;-) http://tinyurl.com/3yqj9dl
Falcon,
je crois que tu trompes lourdement, mais ce n'est pas facile à démontrer. Il y a une presse indépendante qui ne satisfait jamais aucun pouvoir en place: Le Monde a été longtemps dans ce cas. Et quand la gauche est au pouvoir, j'ai souvent trouvé la presse que l'on peut lui associer, sévère pour le gouvernement. L'affaire du Rainbow Varrior, sous Mitterrand, n'a pas été sortie par le Figaro, mais par le Monde, et Edwy Plenel, déjà lui. À mon avis, passé sans doute un moment de flottement, parce qu'il est inconfortable en définitive d'avoir ses "amis" au pouvoir et de les juger sereinement, passé "l'état de grâce", une telle presse serait nettement plus critique que celle de droite aujourd'hui. Encore qu'il faudrait regarder les choses de plus près: je range l'Express plutôt à droite, de nos jours, et il n'est pas toujours d'une grande indulgence pour le sarkozysme.
CC,
nos billets sont voisins, ces jours ci…
Je pourrais faire mienne ta réponse à Falcon, aussi. Une partie de la presse classée "à gauche" pourrait d'ailleurs servir de contre-exemple à ce que dit Falcon: le Nouvel Obs, comme Libération, ont fait preuve plusieurs fois d'une complaisance inattendue envers Sarko —complaisance à nos yeux d'opposants, bien sûr, mais peut-être simplement indépendance?
Isabelle,
absolument, c'est honteux ce que ces étrangers se permettent! (Merci pour le lien, des fois qu'on se perdrait ;-) )
Je me pose une question naïve. Si de l'argent a été reçu, il a bien été dépensé. Je me souviens avoir bossé dans une boîte où il y avait une caisse noire. Toute petite. On se payait le café avec... S'il est passé dans l'argent de poche, on devrait en trouver la trace ? C'est que j'ai peur qu'on ne puisse jamais prouver qu'ils ont bien touché cet argent, c'est déjà miraculeux que quelque chose ait fuité. Même si des preuves plus consistantes apparaissaient, on nous expliquerait la main sur le coeur : "C'est la dernière fois !"
Mtislav,
je crains moi aussi qu'il soit difficile de prouver qui a empoché l'argent, précisément. Mais il doit être possible de vérifier les dires de la comptable: retrouver en Suisse la trace du retrait dans la période dont elle parle. Ce qui déjà conforterait drôlement sa parole!
Quant au "C'est la dernière fois!", ils nous l'ont déjà joué plusieurs fois. Preuve qu'il est temps de changer de république.
Merci pour l'article, ces nouveaux médias ont besoin de notre soutien, ils restent les seuls qui ne s'auto censurent pas (quand ils ne sont tout simplement pas inféodés directement à l'Elysée).
Personnellement je suis abonné à Arrêt sur Images (un petit coup de pub ça ne leur fera pas de mal), pour 36 euro par an vous avez un site avec des contenus quotidiens de grande qualité, qui ne se prive pas pour mettre le doigt là où ça fait mal. Le pouvoir a bien compris le "problème", il cherche par tous les moyens à discréditer ces nouveaux 'médias'. Mais en agissant ainsi ils ne font peur qu'à la mère Michu (ce qui n'est déjà hélas pas si mal..)
De plus je ne sais pas si changer juste de République ferait changer nos dirigeants de leurs mauvaises habitudes, mais permettez-moi d'en douter plus que fortement... "Le pouvoir corrompt, et le pouvoir suprême corrompt le plus".. C'est un autre Nicolas qui l'a dit à son époque, et j'ai bien peur qu'il n'aie jamais cessé d'avoir raison.
Je suis assez d'accord avec ta réponse Coucou, je suis satisfait. Merci d'avoir pris la peine de me répondre.
Entièrement d'accord avec toi pour le soutien qu'il faut apporter à médiapart et à tous ces médias, qu'ils soient sur le net ou bien sur papier, qui ont su se débarrasser de cette vérole inféodante qu'est la publicité pour nous redonner foi en cette profession. "Journalisme indépendant" est une redondance. Pour moi, le journalisme est un contre-pouvoir quel qu'il soit. (je vois d'ici le sourire du faucon).
Un journaliste non indépendant devrait juste penser à changer de métier et faire ... conseiller à l'Élysée par exemple :^)
J'en dis de même, mais avec ton talent d'écriture en moins :)
Haka, je ne sourie pas. Mais je n'ai pas la même conception du journalisme que toi, exclusivement devant être un contre pouvoir. Auquel cas, pas besoin d'oppositions, de syndicats, d'opinions publiques.
J'aime la réponse que m'a faite le Coucou.
Et si tu vas pas là, le journaliste "non indépendant" peut aussi bien être embauché pour faire la communication de parti d'opposition. Un journaliste "non indépendant" de Libération ou de l'Humanité m'est personnellement aussi malsain qu'un journaliste "non indépendant" du 13 heures de TF1 ou de Libération...
Je dis seulement que le journalisme est un contre-pouvoir. Ce ne doit pas être le seul contre-pouvoir. Le journaliste est l'auxiliaire d'une justice qui se doit impartiale dans le sens où toute révélation doit être vérifiée et approfondie par la justice pour en tirer la vérité ou le mensonge. Mais ce genre de procédés relève de l'utopie démocratique et non du sarkozisme triomphant qui piétine tout sur son passage, et pourrit même parfois les belles personnes.
Captainhaka,
on se retrouve une fois de plus, tant mieux! Il y a eu des journalistes totalement dépendant de leur parti à l'époque du stalinisme triomphant, et à droite on voit souvent des articles qu'il est tentant de qualifier de "serviles". Mais attention à ne pas confondre la "ligne" générale des journaux, définie par les patrons de presse, et les journalistes eux-mêmes, lesquels exercent un métier sous le titre qui leur donne du boulot, sans forcément partager tout ce qu'on peut y lire.
Falcon, les contre-pouvoirs doivent toujours s'entendre au pluriel, et la presse en est un, presque par définition, quel que soit le parti politique en place.
Toff, j'ai failli t'oublier…
Je regarde parfois la partie gratuite d'Arrêt sur Images, qui est un site très bien, mais on ne peut pas s'abonner à tout, moi du moins…
Quand je parle de changer de république, ce qui est un thème récurrent sur ce blog, je me réfère obligatoirement à une démocratie de type suisse. J'ai dit et redit ici que nous ne sommes pas une démocratie. Nous ne le deviendrons que le jour où les citoyens auront leur mot à dire à travers un véritable référendum d'initiative populaire. Ce jour là, nous changerons obligatoirement de république.
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