Est-ce bien la fin du mouvement contre la réforme des retraites ? Le gouvernement essaie d'y croire en tout cas, puisqu'il annonce aujourd'hui l'essoufflement de la révolte. Comme hier, comme avant hier, et comme depuis des semaines, avec une mauvaise foi incantatoire bien relayée par une partie des médias. Sur Radio-Sarkozy pour ne prendre qu'un exemple, on ne ferme plus vraiment son clapet les jours de grève nationale. Le matin, il s'y trouve toujours de bonnes âmes pour animer un bout de journal au cours duquel on met hypocritement en doute à l'avance l'ampleur de la mobilisation, ou les dangers encourus par les jeunes… De quoi décourager les flemmards de sortir dans la rue et inciter les parents à garder leurs ados à la maison.
Pourtant, cette fois, il y a des signes encourageants pour la Maison Sarkozy: voici la CFDT qui chuinte l'entrée «dans une nouvelle étape», du moins si l'on a bien compris les propos de François Chérèque. De quoi en effet rendre espoir au gouvernement, d'autant que Bernard Thibaut dit à peu près la même chose pour la CGT, avec des mots différents : «le mouvement prendra d'autres formes»… Ce n'est pas une vraie surprise, puisqu'en repoussant la prochaine journée d'action en milieu de semaine, les dirigeants syndicaux avaient délibérément choisi d'isoler les salariés du pétrole bloquant raffineries et dépôts. Les notables du syndicalisme, comme ceux de la politique ont peur en fait de la nature véritable de la protestation cristallisée par les retraites. Ce qui pousse les gens de tous âges dans la rue c'est le rejet du sarkozysme, de son bilan de régression sociale, et au-delà, le rejet des mœurs politiques de ce pays.
Est-ce à dire que, pour autant, la colère va retomber comme un soufflé avec l'adoption de la loi ? Il y a des bornes pour la capacité des instances dirigeantes d'un syndicat à imposer leur analyse à la base. S'il existe réellement dans le pays une volonté d'en découdre plus longtemps encore avec le pouvoir, elles devront suivre, sous peine d'en payer le prix en désaffection, comme cela a déjà été le cas pour la CFDT. Ce serait une bonne surprise que cette résistance d'un mouvement dont rien ne dit qu'il ne ferait pas tache d'huile ailleurs en Europe : en témoigne la grève bloquant deux dépôts pétroliers en Belgique, par solidarité avec les travailleurs français.
Cependant, on peut comprendre aussi la perplexité des responsables à l'idée de prolonger une crise qui pourrait leur échapper —à supposer que l'ardeur à manifester ne retombe pas. Quelle en serait la perspective, face à un pouvoir qui s'assoit sur la volonté de son peuple ? Nicolas Sarkozy adossé à la fiction d'une légitimité tirée des urnes, peut s'obstiner à son aise, avec la crânerie de l'autocrate disposant de la force d'état. Le retour vers le XIXe siècle que nous impose cet homme, peut aussi déboucher sur la violence des temps de conquêtes sociales chèrement acquises.
Si les Français tiennent à leurs acquis sociaux, on peut douter qu'ils aient le goût de l'aventure ailleurs qu'au cinéma. En découvrant pour mon billet d'hier, les taux de l'endettement des ménages et des propriétaires de leur logement, je me disais que j'avais sous les yeux les limites de la protestation populaire dans la France du XXIe siècle. Nos arrières-arrières-grands-parents n'avaient rien à perdre et beaucoup à gagner. Il est toujours possible de se tromper, bien sûr, et que les gens se rendent compte qu'une certaine classe politique a mis en route un processus de paupérisation qui épargnera très peu de monde. Sauront-ils s'en souvenir en 2012 lorsqu'on leur prêtera, l'espace d'une seconde, la fraction de souveraineté nationale qui revient à chacun et chacune ? C'est si proche et c'est si loin, 2012 !
P-S Le Petit Monde de Gildan nous fait découvrir avec une ardeur passionnée l'album de Stefen K. Je ne suis pas du tout compétent pour juger ou parler de chanson, mais vous aimerez peut-être? En tout cas l'enthousiasme de Gildan éclate…
Pourtant, cette fois, il y a des signes encourageants pour la Maison Sarkozy: voici la CFDT qui chuinte l'entrée «dans une nouvelle étape», du moins si l'on a bien compris les propos de François Chérèque. De quoi en effet rendre espoir au gouvernement, d'autant que Bernard Thibaut dit à peu près la même chose pour la CGT, avec des mots différents : «le mouvement prendra d'autres formes»… Ce n'est pas une vraie surprise, puisqu'en repoussant la prochaine journée d'action en milieu de semaine, les dirigeants syndicaux avaient délibérément choisi d'isoler les salariés du pétrole bloquant raffineries et dépôts. Les notables du syndicalisme, comme ceux de la politique ont peur en fait de la nature véritable de la protestation cristallisée par les retraites. Ce qui pousse les gens de tous âges dans la rue c'est le rejet du sarkozysme, de son bilan de régression sociale, et au-delà, le rejet des mœurs politiques de ce pays.
Est-ce à dire que, pour autant, la colère va retomber comme un soufflé avec l'adoption de la loi ? Il y a des bornes pour la capacité des instances dirigeantes d'un syndicat à imposer leur analyse à la base. S'il existe réellement dans le pays une volonté d'en découdre plus longtemps encore avec le pouvoir, elles devront suivre, sous peine d'en payer le prix en désaffection, comme cela a déjà été le cas pour la CFDT. Ce serait une bonne surprise que cette résistance d'un mouvement dont rien ne dit qu'il ne ferait pas tache d'huile ailleurs en Europe : en témoigne la grève bloquant deux dépôts pétroliers en Belgique, par solidarité avec les travailleurs français.
Cependant, on peut comprendre aussi la perplexité des responsables à l'idée de prolonger une crise qui pourrait leur échapper —à supposer que l'ardeur à manifester ne retombe pas. Quelle en serait la perspective, face à un pouvoir qui s'assoit sur la volonté de son peuple ? Nicolas Sarkozy adossé à la fiction d'une légitimité tirée des urnes, peut s'obstiner à son aise, avec la crânerie de l'autocrate disposant de la force d'état. Le retour vers le XIXe siècle que nous impose cet homme, peut aussi déboucher sur la violence des temps de conquêtes sociales chèrement acquises.
Si les Français tiennent à leurs acquis sociaux, on peut douter qu'ils aient le goût de l'aventure ailleurs qu'au cinéma. En découvrant pour mon billet d'hier, les taux de l'endettement des ménages et des propriétaires de leur logement, je me disais que j'avais sous les yeux les limites de la protestation populaire dans la France du XXIe siècle. Nos arrières-arrières-grands-parents n'avaient rien à perdre et beaucoup à gagner. Il est toujours possible de se tromper, bien sûr, et que les gens se rendent compte qu'une certaine classe politique a mis en route un processus de paupérisation qui épargnera très peu de monde. Sauront-ils s'en souvenir en 2012 lorsqu'on leur prêtera, l'espace d'une seconde, la fraction de souveraineté nationale qui revient à chacun et chacune ? C'est si proche et c'est si loin, 2012 !
P-S Le Petit Monde de Gildan nous fait découvrir avec une ardeur passionnée l'album de Stefen K. Je ne suis pas du tout compétent pour juger ou parler de chanson, mais vous aimerez peut-être? En tout cas l'enthousiasme de Gildan éclate…
9 commentaires:
ce serait ennuyeux que la France donne des idées de contestation aux européens qui morflent en ce moment, les grecs, les espagnols, les anglais, et les belges ;-)
Isabelle,
shocking ! ce serait. Il y a même un économiste américain qui admire notre entêtement à refuser la régression sociale.
Bonsoir le coucou
Bon analyse comme d'habitude mais je voudrais attirer ton attention sur une erreur que l'on commet tous en ce moment.Tu dis souvenons nous en en 2012.Je pense que la date la + importante en fait est 2011 et les cantonales.Selon le scrutin le sénat peut changer de majorité et ce pour la première fois depuis la guerre.
La constitution française ne donne pratiquement aucuns pouvoirs au président .Le principal est d'avoir la majorité aux deux chambres.
Un éboueur qui a repris ce matin (Marseille), disait qu'ils ont été "lâché" par les syndicats...Il se sentait un peu perdu, seul...
...
Merci beaucoup !
:)
bonjour cher coucou,
je fais partie de ceux qui disent, depuis un bon bout de temps, que les français ont plus à perdre qu'à gagner et c'est pour ça que ce "mouvement" était condamné d'avance... tant que nous n'aurons pas 30 millions de personnes dans les rues, tous les jours, rien ne bougera. Et ils continueront à nous en mettre plein la figure, et nous courberons la tête...parce que la grande majorité de la classe moyenne a non seulement plus à perdre qu'à gagner, mais aussi n'est pas assez malheureuse...n'a pas assez la tête sous l'eau. La majorité d'entre nous vivons plutôt bien : ça n'est que quand la pression sera devenue intolérable que ça pourra vraiment détonner, pas avant!
Certes, Jan, l'essentiel est d'avoir la majorité dans les deux chambres. Mais le nouveau calendrier électoral fait que la présidentielle détermine les législatives. Si nos concitoyens (notamment les + de 60 ans) sont assez cyniques pour réélire le démolisseur, ils enfonceront le clou aux législatives comme la dernière fois. Et une majorité de gauche au Sénat ne changerait pas grand' chose. La navette finit toujours par donner raison à l'Assemblée.
Jan,
le Sénat a en effet de bonnes chances de basculer à gauche, mais cela ne nous mènera pas loin avant 2012… Comme le rappelle Omnibus plus bas, le dernier mot appartient aux députés…
Gildan,
j'ai entendu ça aussi à la radio.
Toff,
oui, les temps ont changé et il y a des limites à la colère. Mais ils continuent de changer, les temps, et un moment viendra où les gens se rendront compte de ce qu'ils vont perdre avec l'évolution de la société…
Omnibus,
je suis d'accord avec toi.
Les syndicats sont entre le marteau et l'enclume mais se battent pour garder leur place. On sait depuis 1968 et le célèbre Grenelle qu'ils sont prêts à trahir le mouvement pour des cacahouètes !
:-))
M Poireau,
chut! ce ne sont pas des choses à crier sur les toits !
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