Les gens sont souvent curieux, mais timides. Ils n'osent pas poser les questions qui dérangent, surtout à un personnage important. Comme je l'écrivais hier, les gens ont la trouille. Heureusement, pour les affaires d'importance en rapport avec la probité des personnes qui dirigent notre pays, nous avons les médias. Les journalistes peuvent en principe mieux que nous n'écouter que leur courage et confronter la majesté du pouvoir à ses actes. Ils ont un statut relativement protecteur, ils peuvent compter sur le soutien de leurs confrères en cas de représailles. Du moins dans une certaine mesure, car ce n'est pas toujours exact, ainsi que le démontre l'affaire Val—Pommier, évoquée dans le billet d'hier. Pourtant, il se trouve régulièrement des journalistes courageux, œuvrant le plus souvent pour des organes peu ou pas dépendants de la publicité et plutôt à l'abri des pressions extérieures.
Il y a ainsi une affaire en cours que les grands médias n'effleurent qu'avec répugnance: celle des coulisses fangeuses de l'attentat de Karachi. L'enquête de la justice à son sujet est d'une haute importance, puisque M. Balladur, alors Premier ministre, et M. Sarkozy, son ministre du budget de l'époque, y sont mêlés. On comprend qu'il soit effrayant d'essayer de soulever le voile jeté sur les cadavres des 14 Français tués dans cet attentat, au risque d'en trouver l'origine dans le versement de commissions occultes sur des ventes d'armes que ces hommes politiques n'auraient pu ignorer. Pour vous et moi, le commun des mortels, on parlerait de corruption, et c'est sans doute pour cela que tant de gens serrent les fesses. Néanmoins, il existe des journalistes qui font leur métier, qui ne tremblent pas à l'idée de percer un abcès du pouvoir.
Philippe Alfroy, de l'AFP, a posé à Nicolas Sarkozy la question suivante, lors de la conférence de presse du président à Bruxelles:
«Selon les informations qui ont été rapportées hier à la suite d’une réunion entre les parties civiles dans l’attentat de Karachi et les juges d’instruction, il semblerait que l’origine de l’attentat ne soit pas due à un acte terroriste mais plutôt à des représailles de l’Etat pakistanais après le non versement de commissions. On parle même de rétro-commissions qui auraient pu alimenter la campagne d’Edouard Balladur en 1995. Est-ce que, en tant que ministre du Budget, vous avez été au courant de tels accords ?»
Le sketch de non-réponse de Nicolas Sarkozy, largement diffusé sur internet, vaut le détour…
Ce n'est pas un blogueur obscur qui peut analyser une affaire aussi complexe que sulfureuse, et encore moins enquêter dessus. Des sites de journalistes, Olivier Bonnet sur Plume de Presse, Mediapart, pour ne citer qu'eux, l'ont fait très bien: je vous invite à les lire. Cependant, ce qui reste à ma portée, comme à celle de mes camarades blogueurs, autant qu'à la portée des commentateurs de journaux en ligne, c'est d'empêcher les médias d'enterrer deux fois les victimes de Karachi. Il faut en parler, afin qu'ils en parlent et enquêtent. Il faut en parler avant que le silence et l'oubli ne retombent dessus, presque inéluctable avec l'extension à peu près illimitée du Secret défense que mijote M. Sarkozy dans la prochaine loi de programmation militaire. S'en sera bientôt fini de la possibilité pour les juges d'aller fouiller dans les recoins corrompus du pouvoir.
Nous vivons des temps étranges: sous nos yeux la république se raidit, sans que l'on sache encore si elle tourne à la momie calcifiée, ou bien si elle se caporalise.
Il y a ainsi une affaire en cours que les grands médias n'effleurent qu'avec répugnance: celle des coulisses fangeuses de l'attentat de Karachi. L'enquête de la justice à son sujet est d'une haute importance, puisque M. Balladur, alors Premier ministre, et M. Sarkozy, son ministre du budget de l'époque, y sont mêlés. On comprend qu'il soit effrayant d'essayer de soulever le voile jeté sur les cadavres des 14 Français tués dans cet attentat, au risque d'en trouver l'origine dans le versement de commissions occultes sur des ventes d'armes que ces hommes politiques n'auraient pu ignorer. Pour vous et moi, le commun des mortels, on parlerait de corruption, et c'est sans doute pour cela que tant de gens serrent les fesses. Néanmoins, il existe des journalistes qui font leur métier, qui ne tremblent pas à l'idée de percer un abcès du pouvoir.
Philippe Alfroy, de l'AFP, a posé à Nicolas Sarkozy la question suivante, lors de la conférence de presse du président à Bruxelles:
«Selon les informations qui ont été rapportées hier à la suite d’une réunion entre les parties civiles dans l’attentat de Karachi et les juges d’instruction, il semblerait que l’origine de l’attentat ne soit pas due à un acte terroriste mais plutôt à des représailles de l’Etat pakistanais après le non versement de commissions. On parle même de rétro-commissions qui auraient pu alimenter la campagne d’Edouard Balladur en 1995. Est-ce que, en tant que ministre du Budget, vous avez été au courant de tels accords ?»
Le sketch de non-réponse de Nicolas Sarkozy, largement diffusé sur internet, vaut le détour…
Ce n'est pas un blogueur obscur qui peut analyser une affaire aussi complexe que sulfureuse, et encore moins enquêter dessus. Des sites de journalistes, Olivier Bonnet sur Plume de Presse, Mediapart, pour ne citer qu'eux, l'ont fait très bien: je vous invite à les lire. Cependant, ce qui reste à ma portée, comme à celle de mes camarades blogueurs, autant qu'à la portée des commentateurs de journaux en ligne, c'est d'empêcher les médias d'enterrer deux fois les victimes de Karachi. Il faut en parler, afin qu'ils en parlent et enquêtent. Il faut en parler avant que le silence et l'oubli ne retombent dessus, presque inéluctable avec l'extension à peu près illimitée du Secret défense que mijote M. Sarkozy dans la prochaine loi de programmation militaire. S'en sera bientôt fini de la possibilité pour les juges d'aller fouiller dans les recoins corrompus du pouvoir.
Nous vivons des temps étranges: sous nos yeux la république se raidit, sans que l'on sache encore si elle tourne à la momie calcifiée, ou bien si elle se caporalise.
P-S. Le remaniement ministériel a inspiré notamment Mtislav, PMA, Romain…
12 commentaires:
La république se raidit..hummm... Que veux-u dire?
Hermes,
elle devient autoritaire, dure à vivre…, sarkozyenne en somme. Ça va?
Que veux-tu le coucou, les gens n'ont pas compris que la burqa n'était qu'un sujet à polémique tout juste bon pour taire le plus important...
Comment peut-on compter sur une presse majoritairement détenue par les amis du Président?
IL n'y a guère que les Canards Enchaînés, les Rue89 ou les Mediapart pour ce faire mais ils sont encore trop marginaux dans le paysage médiatique français...
La République, momie calcifiée , tiens, ça m'a rappelé ça
" Les jambes en l'air, comme une femme lubrique
Brûlante et suant les poisons,
Ouvrait d'une façon nonchalante et cynique
Son ventre plein d'exhalaisons "
Il semble que la nouvelle loi sur l'extension (à volonté) du secret défense ait été voté le 18 juin. On imagine aisément que ce n'est qu'un hasard du calendrier…
Nemo,
la télé est assurément aux mains des amis du Président. Mais pour la presse par contre, ce n'est pas encore tout à fait le cas. En dehors d'internet, et du Canard, la presse d'opinion continue vaille que vaille à remplir son rôle, même si elle nous déçoit souvent par ses complaisances vis à vis du pouvoir.
Rébus,
Baudelaire ? Il faut espérer qu'on n'ira pas la charogne!
Filaplomb,
bon, donc c'est déjà dans la poche pour Sarkozy, alors!
Le Coucou : nan ! Ce n'est pas ce que j'ai voulu dire !
D'un point de vue judiciaire, il va être difficile de savoir si Sarkozy a ou non profité de ces rétro-commissions qui ont au final provoqué la mort de 14 personnes (dont 11 français).
Par contre, sur le plan électoral, c'est l'opinion (plus que le peuple) qui vote. Là, c'est à nous de faire savoir que cette histoire existe, en espérant que les médias nationaux s'en empare.
Une élection n'est JAMAIS jouée d'avance !
:-))
Tu as raison, il faut en parler, c'est important. Bravo de l'avoir fait.
voir karachi et mourir, merci Balla !
Filaplomb,
comme ça, en effet, je comprends mieux. Mais 2012 est bien loin: on a rarement vu une affaire dérangeante pour le pouvoir tenir l'affiche aussi longtemps —surtout avec l'édredon médiatique préparé par N. Sarkozy pour la télévision!
Mtislav,
merci, mais je ne suis pas le seul, heureusement! :-)
Peuples,
Balla, Sarko, et Chirac: si ce rebondissement est vrai, ils ont tous joué dans la pièce…
Le "sketch" de non retour vaut en effet le détour. Je trouve le rire de fin très très étrange...
Elrring,
vraiment, cette vidéo est un monument d'embarras. Après avoir vu N. Sarkozy dans cet état, on peut se dire que l'affaire est sérieuse, il me semble!
Merci du passage…
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