Un problème de la vie en société, peut-être pas le principal, mais un gros problème tout de même, c'est que les gens sont craintifs. Enfin, je dis craintifs pour ne pas froisser la susceptibilité des gens, parce qu'en secret je pense qu'ils sont des sales trouillards, des péteux méprisables. Les gens c'est comme ça… Je les connais bien, je les fréquente tous les jours, les gens, et y en a même un dans le tas que je surveille de près: moi. Parce qu'un autre problème de la vie en société, c'est que ça salit facilement, c'est pas toujours propre, et de bas en haut de l'échelle. On s'y frotte, ce n'est pas facile de rester immaculé…
Tenez, tout au début de ce blog, j'ai raconté comment, dans mon village, un bonhomme avait trahi ses électeurs, dont j'étais, en changeant de camp par surprise après les municipales. Il s'était fait élire maire en ralliant la liste théoriquement vaincue par les urnes… Un tour de passe-passe légal, mais moralement inadmissible.
Si tous les gens choqués s'étaient révoltés, interrompant la séance, s'ils avaient exigé l'annulation des élections, et occupé la mairie avec la volonté de tenir tête aux pseudos élus, aux gendarmes, au préfet, à la ministre de l'intérieur, au président de la république, à Dieu le Père… Que diable serait-il arrivé? Eh bien, pour le moins, le nez de Cléopatre se serait rallongé dans sa tombe. Aujourd'hui tout cela est loin, le village est paisible, tout va bien. Les gens pensent que l'herbe pousse trop vite, à cause des pluies de printemps.
Il n'y a pas que nous autres, les provinciaux perchés sur nos collines béates: les gens sont partout, même à Paris. Vous vous souvenez sans doute du barouf médiatique provoqué par l'éviction de Siné de Charlie Hebdo… À l'époque, certains suggéraient que Philippe Val, son patron, l'aurait viré pour lécher le cul à Nicolas Sarkozy. Ceux-là, ils n'étaient pas trouillards comme moi, qui mets au conditionnel une insinuation étonnamment confortée depuis par la nomination de P. Val à la direction de France Inter. Quoi qu'il en soit, à la rédaction de Charlie Hebdo, les gens ont courbé l'échine devant le chef pris en flagrant délit d'égarement. Seule, une infime minorité a soutenu Siné.
Et les gens de France Inter? Tiens, parlons-en! Un matin, Jean-Luc Hees, le nouveau président intronisé par Nicolas Sarkozy, se précipite à l'antenne pour rectifier les propos d'Edwin Plenel. À l'écouter, il voulait défendre l'honneur de la station, mais il n'est pas interdit de penser que la crainte de déplaire à son seigneur et maître présidentiel inspirait son étonnante démarche.
Peu de temps après, c'est Nicolas Demorand qui repasse courageusement le même plat…
Jeudi matin enfin, toujours sur France Inter, Phillippe Val, ex-patron de Charlie, prend ses fonctions de nouveau directeur de la maison. Deux heures après, il vire Frédéric Pommier de la revue de presse que celui-ci anime tous les jours à 8h30. Il n'aime pas sa manière de conduire la revue de presse. Évidemment, il s'agit d'une décision technique, le choix d'un homme de radio expérimenté, et non pas d'une vengeance crapoteuse comme de mauvais esprits pourraient le penser. M. Val avait en effet reproché à F. Pommier quelques mois auparavant, de trop souvent citer Siné Hebdo, le journal de son ennemi personnel… Bon, bien, tout ça pour dire qu'à France Inter comme à Charlie, la rédaction ne s'est pas mise en grève devant cette troisième preuve de sarkozyte rampante. L'intersyndicale a protesté, mais grosso modo, l'affaire ne fait pas sauter le citoyen journaliste au plafond. Ces gens là doivent bien bouffer, comme nous.
Il y a aussi des gens lâches en haut lieu, comme ces députés de l'opposition, surtout du PS, qui n'ont pas osé manifester avec éclat leur réprobation devant la mascarade de Versailles. Jean-Luc Mélenchon, qui les connaît un peu, les a traités de pleutres…
Il faudrait que de bas en haut, nous soyons capables de temps en temps de nous mettre en colère pour autre chose que les injustices qui nous touchent personnellement. Avec un poil de courage en plus chez les gens, tant de choses pourraient changer!
P-S. À lire: les Notes de lecture de Lediazec, et sur Intox2007 comment poser vos questions à des économistes…
Tenez, tout au début de ce blog, j'ai raconté comment, dans mon village, un bonhomme avait trahi ses électeurs, dont j'étais, en changeant de camp par surprise après les municipales. Il s'était fait élire maire en ralliant la liste théoriquement vaincue par les urnes… Un tour de passe-passe légal, mais moralement inadmissible.
Si tous les gens choqués s'étaient révoltés, interrompant la séance, s'ils avaient exigé l'annulation des élections, et occupé la mairie avec la volonté de tenir tête aux pseudos élus, aux gendarmes, au préfet, à la ministre de l'intérieur, au président de la république, à Dieu le Père… Que diable serait-il arrivé? Eh bien, pour le moins, le nez de Cléopatre se serait rallongé dans sa tombe. Aujourd'hui tout cela est loin, le village est paisible, tout va bien. Les gens pensent que l'herbe pousse trop vite, à cause des pluies de printemps.
Il n'y a pas que nous autres, les provinciaux perchés sur nos collines béates: les gens sont partout, même à Paris. Vous vous souvenez sans doute du barouf médiatique provoqué par l'éviction de Siné de Charlie Hebdo… À l'époque, certains suggéraient que Philippe Val, son patron, l'aurait viré pour lécher le cul à Nicolas Sarkozy. Ceux-là, ils n'étaient pas trouillards comme moi, qui mets au conditionnel une insinuation étonnamment confortée depuis par la nomination de P. Val à la direction de France Inter. Quoi qu'il en soit, à la rédaction de Charlie Hebdo, les gens ont courbé l'échine devant le chef pris en flagrant délit d'égarement. Seule, une infime minorité a soutenu Siné.
Et les gens de France Inter? Tiens, parlons-en! Un matin, Jean-Luc Hees, le nouveau président intronisé par Nicolas Sarkozy, se précipite à l'antenne pour rectifier les propos d'Edwin Plenel. À l'écouter, il voulait défendre l'honneur de la station, mais il n'est pas interdit de penser que la crainte de déplaire à son seigneur et maître présidentiel inspirait son étonnante démarche.
Peu de temps après, c'est Nicolas Demorand qui repasse courageusement le même plat…
Jeudi matin enfin, toujours sur France Inter, Phillippe Val, ex-patron de Charlie, prend ses fonctions de nouveau directeur de la maison. Deux heures après, il vire Frédéric Pommier de la revue de presse que celui-ci anime tous les jours à 8h30. Il n'aime pas sa manière de conduire la revue de presse. Évidemment, il s'agit d'une décision technique, le choix d'un homme de radio expérimenté, et non pas d'une vengeance crapoteuse comme de mauvais esprits pourraient le penser. M. Val avait en effet reproché à F. Pommier quelques mois auparavant, de trop souvent citer Siné Hebdo, le journal de son ennemi personnel… Bon, bien, tout ça pour dire qu'à France Inter comme à Charlie, la rédaction ne s'est pas mise en grève devant cette troisième preuve de sarkozyte rampante. L'intersyndicale a protesté, mais grosso modo, l'affaire ne fait pas sauter le citoyen journaliste au plafond. Ces gens là doivent bien bouffer, comme nous.
Il y a aussi des gens lâches en haut lieu, comme ces députés de l'opposition, surtout du PS, qui n'ont pas osé manifester avec éclat leur réprobation devant la mascarade de Versailles. Jean-Luc Mélenchon, qui les connaît un peu, les a traités de pleutres…
Il faudrait que de bas en haut, nous soyons capables de temps en temps de nous mettre en colère pour autre chose que les injustices qui nous touchent personnellement. Avec un poil de courage en plus chez les gens, tant de choses pourraient changer!
P-S. À lire: les Notes de lecture de Lediazec, et sur Intox2007 comment poser vos questions à des économistes…
18 commentaires:
Si j'avais osé, j'aurais bien laissé un commentaire...
Chez moi aussi mon maire est très loin de posséder le meilleur QI du village c'est certainement même, le contraire et pourtant tous autour de lui disent AMEN ,Quelles en sont les raisons profondes?Mystères! Pour moi,mais peut-être pas pour tout le monde!
Entre l'accablement et la crainte, difficile de dire si les réformes à venir feront bouger le français. Avec la crise comme prétexte, et comme tu le soulignes, il faut bien bouffer...
Les gens semblent être pris dans une sieste perpétuelle, une manière de se considérer comme étrangers à ces choses d'en haut, de Paris, de la Capitale…
Rassure-toi, nous savons que les gens finissent toujours par se réveiller !
:-)
[J'aime beaucoup Mélenchon d'ailleurs, pour ce côté courage…].
Je précise, à l'usage de Nicolas, que je me suis bien abonné aux commentaires !
;-))
D'une part, Macao m'a ôté les mots de la bouche ! J'en aurais même rajouté !
D'autre part le problème que vous soulevez, Le coucou, est un problème récurrent... il y a toujours eu beaucoup de "péteux", comme vous dîtes, et très peu de courageux ! Les gens n'affichent jamais ouvertement leurs opinions, ils préfèrent se cacher ou louvoyer, c'est tellement plus confortable ! Et ceux qui la ramènent sont considérés comme des emm....... de première et deviennent même pestiférés ! Où est donc passée la liberté d'expression ? Où sont donc passées les valeurs républicaines ?
Bon j'arrête, sinon je ne vais pas partir bosser dans de bonnes conditions ! :-)
Cher Macao, il y a des situations dans lesquelles la seule mention d'un "QI", relève déjà de l'oxymore.
"Avec un poil de courage en plus chez les gens, tant de choses pourraient changer!"
Bon. Faut pas rêver, non plus !
Mélenchon me plaît bien aussi.
Un franc-parler qui a la petite note en plus qui ne sonne pas faux, à mettre en parallèle avec le "faux(faut)-parler" de notre nanoprésident !
Christine,
vous auriez dû vous exprimer, si vous en aviez envie! Vous êtes proche du MoDem, d'après votre blog : le sympathisant du PS que je suis aurait lu votre avis avec curiosité.
Macao,
c'est peut-être que le QI de ce maire est en adéquation avec celui de la majorité de la population…
Homer,
on rencontre rarement des gens qui se prétendent satisfaits de l'état des choses actuel, mais tout le monde est plus ou moins inquiet du lendemain. Lâcher la proie pour l'ombre demande une bonne dose d'insouciance: il manque une vraie figure, une véritable alternative à opposer à N. Sarkozy.
M. Poireau,
oui, il vient toujours un moment où la société s'ébroue et rue dans les brancards, le problème c'est qu'il lui en faut beaucoup avant d'en arriver là!
(Mélenchon a souvent le mérite d'une parole claire, mais je n'approuve pas toutes ses prises de position, loin s'en faut! Par exemple, sa sortie contre les Tibetains et le dalaï-lama, le rangeant aux côtés des Chinois, m'a révolté)
Bérénice,
les gens sont rarement péteux en petit comité, dans le privé ou au comptoir du bistro par exemple. Les choses se gâtent lorsqu'il leur faut prendre une position ou s'impliquer publiquement. Et il est vrai que "la ramener", comme vous dites, fait plus facilement de vous un sujet d'inquiétude que d'approbation. Tout le monde a entendu parler de la liberté d'expression et la trouve indispensable, mais lorsqu'elle est là, elle porte plutôt à faire rougir —je n'ose pas écrire: comme la vérité sortant nue du puits, parce que le fait d'ouvrir sa gueule n'est évidemment pas un gage de vérité…
Katchina, merci du passage.
;-)
Nicolas,
mais si, il faut rêver! Sinon l'avenir, proche ou lointain, serait bien sinistre.
Circé,
même réponse que pour M Poireau: j'apprécie Mélenchon jusqu'à un certain point… Franc-parler sans doute, mais il a aussi ses œillères…
Le Watergate français sera-t-il étouffé ?
Ou alors le clan Balladur-Sarkozy sera-t-il jeté en prison ?
Nous avons peut-être la réponse dans cet article explosif :
http://www.plumedepresse.com/spip.php?article1158
Je rencontre beaucoup de belles au bois dormant ou alors sont-ce des insomniaques amnésiques. :-(
Val a viré le journaliste qui s'occupait de la revue de presse parce qu'il ne maîtrisait pas le conditionnel. Il préfère l'impératif.
Je suis scandalisé. Si j'étais Iranien, je rêverais d'en faire un twit.
Ca marche pas http://twitter.com/mtislav.
Derrière mon pseudo, j'ai du courage...Dans la vie...la vraie, c'est autre chose...
Mais si tout le monde s'y mettait, là...
BA,
bonne question! J'ai lu cet excellent article, et j'ai fait de Karachi le sujet de mon billet du jour.
Anne,
les belles au bois dormant sont légion, c'est navrant, mais qu'y faire?
Mtislav,
mais oui, bien sûr! Tu as tout pigé, comme d'habitude!
Nicolas,
ça ne marche pas en effet, et je n'ai pas compris où on débarque…
CC,
Si tout le monde s'y mettait, on n'aurait plus besoin de pseudo: il serait toujours normal de s'interroger publiquement, personne n'y verrait matière à reproche.
Mais ce n'est pas pour tout de suite…
Rostro a bien fait de vous mettre en lien dans son article d'aujourd'hui.
Loïs,
bienvenue et merci.
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