mardi 14 juin 2011

Prendre une vessie pour un référendum populaire

Au journal de treize heure de France Inter étaient évoqués les résultats du référendum en Italie. Si je m'étais trouvé dans le studio avec Claire Servajean et son invité Noël Mamère, je les aurais bouffés crus. Comme je n'étais pas en situation d'écrire le moindre billet le gros de ma colère est retombé depuis, ce qui n'est pas plus mal, son motif étant dérisoire au regard du peu de cas que l'on fait de la démocratie dans ce pays.

À l'ouverture de son journal, Mme Servajean a donc annoncé l'abandon du nucléaire par les italiens au nombre des sujets abordés, ajoutant que l'on parlerait de ses implications en France. Puis, elle s'est demandé «où en est le référendum d'initiative populaire qui est pourtant inscrit dans la constitution ?» C'est là que mon taux d'adrénaline a commencé à grimper, pour atteindre son maximum lorsqu'il fut réellement question de notre Arlésienne référendaire avec Noël Mamère.

Que les naïfs qui pullulent sur le web gobent cette appellation et la reproduisent à l'occasion est excusable. En revanche, qu'une journaliste responsable du principal journal de l'antenne et un député de l'opposition entretiennent complaisamment la confusion entre initiative populaire et initiative parlementaire est de la malhonnêteté. Ils savent de quoi ils parlent.

Le référendum d'initiative des italiens est populaire parce qu'il suffit à cinq cents mille électeurs (ou cinq conseils régionaux) de le demander pour qu'il soit organisé —à condition que les questions posées soient autorisées par la loi.

Le référendum d'initiative à la française est anti-populaire, car il ne peut être exigé que par un cinquième des parlementaires (députés et sénateurs), qui doivent ensuite, et ensuite seulement, obtenir le soutien de 4,5 millions d'électeurs. C'est un référendum d'initiative parlementaire.
De toute façon, cet instrument pseudo-démocratique n'a qu'une existence théorique puisque Sarkozy n'a pas encore autorisé la discussion et le vote au parlement de la loi qui le rendraient applicable.

Ni Claire Servajean ni Noël Mamère n'ont souligné cette différence considérable entre les deux options référendaires. Ce n'est pas innocent : l'écrasante majorité des élus s'estiment propriétaires de la démocratie, confisquée par la mise au rebut de la Constitution de l'An 1. Il ne faut pas attendre des journalistes habitués à être de connivence avec eux qu'ils les bousculent dans leurs certitudes.

Comme pour le billet d'hier, cela m'amène à conclure sur la perspective ouverte par la prochaine présidentielle. L'inscription d'une version non édulcorée du référendum d'initiative populaire au programme des présidentiables, pourrait être de nature à redonner de l'espoir à gauche. À toute la gauche. La démocratie est après tout un grand dessein. Mais qui serait capable de mettre cette idée en avant au PS, fer de lance de l'opposition ? Pour le moment, je ne vois que Ségolène Royal ou Arnaud Montebourg.

P-S Notre ami Olivier P. s'est éteint au début du mois. Arnaud et Nicolas lui rendent un dernier hommage sur son blog «C'est juste histoire de dire». Au revoir Olivier.

13 commentaires:

Nicolas Jégou a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Nicolas Jégou a dit…

Merci d'avoir relayé le billet chez Olivier.

Gildan a dit…

Calme ta colère et appelle la demain, en plein direct !
Euh ... Préviens nous si tu le fais hein !!!
:)

...
Rip, Olivier P. ainsi qu'à Marie (voir chez mrsclooney)... Pas la joie aujourd'hui sur la blogo !
:(

Cui cui fit l'oiseau a dit…

Oui.

Il faut absolument profiter de ces élections pour réformer la Constitution.

Chacun sait que les réformes doivent être engagées dans le 4 premiers mois. Après, les blocages apparaissent et c'est râpé pour 4 ans et demi !

Billet qui fait réfléchir.

Le coucou a dit…

Nicolas,
normal… Merci d'avoir ouvert le bon œil par ici !

Gildan,
ça m'étonnerait que je le fasse. Je serai encore dans ma bagnole…

Cuicui,
c'est en effet le seul moment possible : soit un candidat promet le renouveau et tente de le réaliser aussitôt élu, soit il faut attendre une crise majeure… Le monde politique ne se réforme jamais spontanément.

Opaline a dit…

Quelle chance de croire encore en Ségolène Royal !
Qu'elle ait voté "oui"au dernier référendum, cela la regarde, c'est le jeu de la démocratie. Mais qu'elle ait participé au déni de démocratie qui consistait de faire passer en force un texte refusé par le peuple, est-ce le rôlr d'un fer de lance ?

vincent a dit…

Oui il n'y a aucun point commun entre le référendum d'origine populaire italien et le notre !!!
Oui il n'est toujours pas applicable !!!
Mais surtout ,surtout il peut etre retardé voir supprimé si le parlement ce saisi de cette discussion !!!
Ceci étant dit, il convient de se poser la question
Cette disposition( réferendum ) est elle une bonne chose ?...
Si j'en juge par ce qu'en fait la droite populaire en Suisse... une interrogation est pour le moins légitime .
Pour ce qui risque d'arrivée dans notre pays aux 360 fromages ... J'ai plus d'une réticence .
Alors me diras tu pour ou contre ?
Sans hesiter contre , pourquoi ?
Tout simplement la societé n'est pas appaisée .
Alors quand ?... Plus tard beaucoup plus tard quand regardant le ciel nous saurons faire la difference entre une colombe est une buse ....

Didier Goux a dit…

Cela dit, bouffer Noël Mamère, ce n'est plus du courage mais de l'inconscience !

Le coucou a dit…

Opaline,
une confidence : je ne crois en personne parmi les politiques pour avoir envie de démocratiser réellement la vie publique. J'observe seulement les traces de bonne volonté proclamée, là où il en existe.

Vincent,
j'ai déjà évoqué le référendum d'initiative populaire dans pas mal de billets, et par conséquent répondu plusieurs fois à tes objections, qui sont sans surprise —toujours les mêmes sous différents costumes. Le peuple voterait mal ? Mais il est le souverain, mon cher ! S'il fait des conneries, c'est que l'on n'a pas su le convaincre dans les débats. Les Suisses n'ont pas voulu majoritairement des minarets, c'est le droit de la majorité. Et puis, ce qu'un référendum a fait, un autre peut le défaire plus tard…
P-S: la société ne sera jamais apaisée parce qu'il traîne chez nous une frustration démocratique depuis la Révolution.

Didier,
je dois être suicidaire, c'est pour ça.

Elo a dit…

Un beau coup de gueule qui fait du bien ! Merci pour ces précisions sur les référendum que je ne connaissais pas !
Bises

Le coucou a dit…

Elo,
tant mieux si le billet est un peu utile aussi ! :-)

Le_M_Poireau a dit…

Tu ne voudrais pas que les journalistes réfléchissent en plus de remplir leurs antennes ? Namého ! Esclavagiste !
:-)

Le coucou a dit…

Poireau,
:)
à mon avis, dans ce cas précis, ils ont estimé qu'entrer dans les détails dépasserait l'entendement des auditeurs…