M. Fillon, notre premier ministre, s'est vanté récemment d'avoir «gagné idéologiquement contre les 35 heures»… Qu'il se méfie : en matière d'idéologie, à notre époque les victoires sont incertaines. Le progrès social est une attente profonde, gravement déçue depuis l'arrivée des années Sarkosy. Travailler plus longtemps pour un salaire à peine meilleur est une négation de l'idée de progrès. Nous vivons des temps où la robotisation des tâches ingrates pourrait presque être généralisée, où les machines suppléent à l'homme dans d'innombrables domaines. Ces robots, ces machines, qui ont supprimé ou supprimeront des quantités d'emplois n'en continueront pas moins à enrichir les actionnaires des usines. Et s'ils sont devenus riches, c'est grâce au travail des générations d'ouvriers, d'employés, qui ont peiné pour eux et leurs prédécesseurs au cours des âges. La moindre des choses que l'on pourrait espérer, c'est que chaque emploi perdu ainsi donne lieu au versement intégral de cotisations sociales calculées sur la base d'un salaire fictif, révisable annuellement. Notre système de protection sociale et de retraite par répartition devrait en tirer un vrai soulagement. Le salarié ordinaire n'est pas fait pour s'épuiser au travail, il aspire à jouir de la vie aussi bien que ses patrons, vouloir le contraindre à y renoncer est contre-nature. Lorsque dans ce dessein, on nous inflige le spectacle de Sarkosy serrant la paluche des patrons de «la France qui se lève tôt», on oublie de préciser qu'il s'agit en contrepartie de «la France qui se couche comme les poules». MM. Sarkosy et Fillon auront beau s'agiter, ils auront du mal à battre en brèche durablement la seule formule que les hommes admettent sans rechigner : «travailler moins pour gagner plus».
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